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Tintin au Congo

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Catégorie : Bande dessinée

Genre : Aventure

Année : 1931 (noir et blanc) 1946 (couleur)

Nombre de pages : 62

Nation : Belgique

Auteur : Hergé

Synopsis : Le célèbre reporter Tintin et son fidèle compagnon Milou, sont envoyés pour au Congo pour y effectuer un reportage. Mais déjà sur le bateau qui les mène vers l’Afrique, ils doivent faire face à un bandit qui cherche àéliminer Tintin. Le voyage au Congo sera plein de péripéties, entre fusillades, guérillas de tribus africaines, chasse au lion, crocodile, léopard, éléphants…

Analyse critique :

(Attention SPOILERS)

Nous continuons donc notre cycle Tintin avec ce qui est sans doute l’album le plus polémique et controversé de toute la série. Nous sommes en 1931 et Hergé vient de connaître son premier grand succès avec Les Aventures de Tintin aux Pays des Soviets. L’année suivante donc, l’artiste belge récidive en décidant d’envoyer son héros dans le Congo (qui à l’époque est une colonie de la Belgique).

Tintin s’embarque alors dans une série d’aventures au Congo. Comme je le mentionnais plus haut, cet album est le plus controversé de tous. Pourtant à sa sortie, il connut un énorme succès. Ce n’est qu’après guerre lors de l’exportation internationale de Tintin, que les premières polémiques apparurent. Ainsi la version colorisée de Tintin au Congosera largement censurée et édulcorée par rapport au support original en noir et blanc. La BD est en effet accusée de véhiculer des clichés racistes envers les africains et de prôner le colonialisme.

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Suite à ces scandales, la maison Castermann décide de ne plus éditer cet album qui au début des années 60 devient quasiment introuvable. Cependant, Hergé fait pression pour que l’album soit de nouveau produit et dans les années 70, de nouvelles éditions sont remises en circulation.

Au début du XXIème siècle, cependant, les polémiques reprennent de plus belle et certaines associations cherchent même à faire interdire l’album. Cette interdiction ne sera pas obtenue mais dans beaucoup de librairies, Tintin au Congosera déplacé au rayon « BD pour adultes ».

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Que dire donc au sujet de ces polémiques ? Certes, Tintin au Congo entretient une vision colonialiste et véhicule des clichés peu flatteurs sur les africains. On peut aussi évoquer la façon de parler en « petit nègre », d’ailleurs à ce niveau là, la version couleur a été largement édulcorée par rapport à la première édition en noir et blanc. Mais personnellement, je refuse de cracher sur Tintin au Congo, car c’est un peu facile et malhonnête. Car dans le fond, Tintin au Congo appartient à son époque et n’était pas le seul à entretenir ces clichés sur l’Afrique. C’est pour ça que ça m’énerve toujours un peu les donneurs de leçons sur ce livre là. C’est très facile aujourd’hui, où on prône l’antiracisme partout et jusque dans les écoles, de crier au scandale, mais s’ils étaient nés à l’époque, ces gens-là qui crachent sur l’album, auraient sans doute trouvé cela tout à fait normal. Etait-ce bien ou mal ? Là encore je ne vais pas répondre à cette question car c’est un peu facile de jouer les moralistes plus de 80 ans après la sortie de l’album. Et surtout de parler de la mentalité d’une époque différente qu’on n’a pas connue.

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Ensuite, Tintin au Congo est-il un livre profondément raciste ? S’il véhicule une fois encore des clichés qui pourront éventuellement être jugés offensants envers les africains, je ne vois nulle part de haine raciale de la part d’Hergé. On y voit simplement un auteur qui, de son propre aveu par la suite, n’avait jamais été au Congo et s’était fié aux clichés colportés à l’époque. Mais le problème n’est pas là, il s’agit surtout et avant tout de caricatures. Et on peut rire de ces caricatures comme de n’importe quelles autres.

Une preuve qui devrait clouer le bec à tous les petits bobos donneurs de leçons, c’est le fait que Tintin est extrêmement populaire au Congo. Le premier fait qui en témoigne est lorsqu’en 1970 le magazine congolais « Zaïre », lancé par le président Mobutu, réclama la réédition de l’album qui avait à cette époque là disparu de la circulation. C’est ce fait notable dont on parle pourtant peu qui fut utilisé par Hergé comme argument de poids pour faire rééditer Tintin au Congo en Europe.   

    

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Je citerai également le témoignage d’Auguy Kakese, ce sculpteur congolais qui a fait fureur sur la toile. Ce dernier s’est spécialisé dans les sculptures de l’univers de Tintin un business apparemment très lucratif au Congo. « Au Congo, on lit Tintin à la maison, on lit Tintin à L’école…On lit Tintin partout ! ». Selon lui, au Congo, Tintin est même en statue sur la voie publique. Des gens comme Auguy Kakese ou encore Michel Kitiwi Mwamba, propriétaire d’un établissement nommé« Chez Tintin » comprennent totalement les caricatures de l’album. « Quand on voit les caricatures sur les Blancs aujourd’hui, on ne peut pas dire non à celles sur les Noirs », déclare Michel.

En réalité la plupart des congolais connaissent et aiment Tintin.

 

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De plus, ce n’est sans doute pas l’Afrique qui est ciblée ici mais bien à un moment donné l’impérialisme américain. Et c’est même assez logique de voir une vision colonialiste s’opposer à l’impérialisme. Ici, en l’occurrence, le méchant est le célèbre gangster de Chicago Al Capone.

 Méchant qu’on ne voit jamais dans l’album mais dont on apprend qu’il est le chef d’une bande à laquelle se frotte Tintin et qui pille les richesses de l’Afrique, ici plus précisément des diamants.

On retrouve donc une critique de l’expansionnisme impérialiste américain. Ainsi après avoir critiqué l’internationale communiste dans Tintin au Pays des Soviets, Hergé critique logiquement l’internationale capitaliste.

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On pourra aussi évoquer la chasse aux animaux qui a fait polémique notamment au début du XXIème siècle. Le Siècle de l’écologie, où il est choquant de voir des animaux tués mais pas des humains. Certes, dans Tintin au Congo, le jeune reporter massacre pas mal de bestiaux. Certains trouvent la scène avec les gazelles horrible, perso je la trouve amusante. Certes, Tintin tue souvent pour le goût de la chasse mais là encore il convient de resituer l’album dans son contexte de l’époque, où la culture et la mentalitéétait tout simplement différente.

Voilà donc grosso-modo concernant le fond de Tintin au Congo qui se veut avant tout une œuvre d’aventure marchant sur les pas de l’album précédent. A savoir une série de petites aventures se déroulant au Congo.

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Sur le plan artistique, Tintin au Congo marque aussi une étape. Hergé peaufine son personnage et la silhouette de Tintin s’affine peu à peu. C’est également dans cet album que Tintin portera pour la première fois ses culottes de Golf soulignant encore davantage sa parenté avec le sulfureux Léon Degrelle. Mais surtout, Tintin au Congo sera réédité en couleur à partir de 1946 et il faut dire que cette réédition vaut le coup d’œil. Certaines planches sont vraiment très belles et l’artiste Hergé sait jouer avec les couleurs. Les dessins sont améliorés et beaucoup plus travaillés.

On notera aussi que c’est dans cet album qu’apparaissent pour la première fois Dupond et Dupont que l’on voit seulement sur un carré d’une planche. Cependant, cette affirmation n’est vraie qu’en se fiant aux versions colorisées puisqu’ils n’étaient pas dans la version originale en noir et blanc de 1931.

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Tintin au Congo est donc une bonne BD d’aventure qui ne mérite clairement pas l’interdiction. Une fois encore l’album est très populaire au Congo et après Tintin en Amérique, c’est le second album de Tintin le plus vendu au monde, n’en déplaise aux bien-pensants donneurs de leçons. 

 

Note : 15/20


Tintin en Amérique

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Catégorie : Bande dessinée

Genre : Aventure

Année : 1932 (noir et blanc) 1946 (couleur)

Nombre de pages : 62

Nation : Belgique

Auteur : Hergé

Synopsis : Tintin le jeune reporter est envoyé en Amérique et plus précisément dans la ville de Chicago pour y réaliser un reportage sur le crime organisé. La Pègre de la ville voit d’un mauvais œil cette nouvelle arrivée qui pourrait ruiner leurs plans et elle décide rapidement d’envoyer un tueur contre Tintin. Ce dernier aura à faire face au redoutable Al Capone, à des gangsters notoires et même à des indiens.  

Analyse critique :

(Attention SPOILERS)

Continuation de notre cycle Tintin avec le troisième album de la série, Tintin en Amérique. Un album qui fait plus ou moins la jonction avec ce que va devenir Les Aventures de Tintin.

Après être passé par l’URSS, le Congo, notre jeune reporter et son fidèle compagnon Milou partent vers l’Amérique. Destination logique pour deux raisons.

Premièrement, dés la fin de Tintin au Congo, Tintin annonçait qu’il allait préparer un voyage en Amérique. Ensuite, cela suit le cheminement politique d’Hergé qui, issu des milieux nationalistes et catholiques, avait beaucoup critiqué le communisme et s’attaque donc logiquement au capitalisme désormais.

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Le capitalisme, il l’avait plus ou moins attaqué dans l’album précédent Tintin au Congo en ciblant notamment l’impérialisme anglo-saxon.

Tintin part donc en Amérique. Le postulat de départ est toujours le même, la venue du reporter fait sensation dans le pays et dés son arrivée, il est pris en chasse par un tueur. A ce niveau là, Tintin en Amériquene déroge pas à la règle. Cela dit le contenu va être ici beaucoup plus profond.

Déjà, la première image annonce la couleur lorsqu’on voit un policier saluer un gangster qui visiblement vient de commettre un crime.

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Hergé dessine donc le crime organiséà Chicago et notamment son égérie de l’époque le gangster Al Capone. Ce dernier était déjà mentionné dans Tintin au Congo mais ici, il apparaît bel et bien et fait partie des personnages de la première partie.

Tintin en Amérique se présente comme les autres albums, à savoir sous la forme d’une série d’aventures et de péripéties.

L’Album a été assez critiqué ces derniers temps. Certains lui ont reproché de donner une mauvaise image d’une Amérique peuplée de gangsters.

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Mais en 2015, Tintin en Amérique, tout comme Tintin au Congo a eu le droit à une accusation de racisme. En effet, des résidents du Winnipeg, au Canada, ont demandéà une librairie de retirer l’album des rayons car ils estimaient « son contenu discriminatoire envers les premières nations », que le livre « donnait une vison péjorative des autochtones » et qu’il présentait les indiens « comme des êtres sauvages et dangereux, des êtres que l’on doit craindre ».

En entendant cela on croit clairement rêver. Autant on pouvait à la rigueur comprendre les polémiques qui entouraient Tintin au Congo, autant là, on comprend juste qu’on a affaire à une petite bande d’affairistes prêt à n’importe quoi pour se faire un petit billet ou pour emmerder le monde. Car en effet, au Canada, Tintin en Amérique est n°1 des ventes de tous les albums de Tintin.

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Revenons alors sur ces prétendues visions discriminatoires. Premièrement les bandits de Chicago. Oui il y’en a beaucoup dans cet album. Et alors ? Ira-t-on jusqu’à nier que dans les années 30, Chicago était la capitale du crime organisé ? Hergé ne fait que représenter un phénomène que les américains notaient eux-mêmes à l’époque, une apogée terrible du grand banditisme. Ici, l’auteur dénonce la corruption dans les milieux haut placés et la terreur que font régner les gangs. Mais plus que cela, il ne s’attaque pas seulement aux gangsters mais également aux banksters. Les affairistes et les industriels libéraux américains en prennent pour leur grade. Au final, il montre la dérive et la décadence des sociétés capitalistes ultralibérales. C’est sans doute pour cela que l’album fut attaqué.

Mais venons-en aux amérindiens, le livre serait-il raciste envers ce peuple premier d’Amérique ? Pas du tout et même au contraire. Leur hostilité envers Tintin trouve même une justification dans le sens où ils ont été dupés par le bandit Bobby Smiles qui leur a fait croire que le jeune reporter convoitait leurs territoires. En réalité, le livre montre au contraire comment le gouvernement américain et notamment les compagnies pétrolières chassent sans pitié les indiens de leurs territoires pour les exploiter. Hergé dénonce donc ici le mal fait aux amérindiens par l’impérialisme anglo-saxon. A l’époque où les westerns à succès montraient les indiens comme des salauds face aux gentils cow-boys, on ne peut que saluer le courage et la clairvoyance d’Hergé pour avoir montré un peuple amérindien opprimé par le libéral américain.  On voit donc difficilement ce que l’on peut reprocher à Hergé. Mais visiblement, certains estiment qu’il aurait dû montrer des indiens 100% parfaits sans aucune tâche. Si toutes les communautés et tous les peuples exigent de même, ça risque d’être compliqué !

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D’ailleurs, concernant les accusations de racisme envers les noirs portés contre Hergé par rapport àTintin au Congo, on peut dire ici qu’elles étaient au final biaisées, car l’auteur dénonce également le racisme envers les afro-américains dans ce nouvel album. Notamment lorsqu’on apprend que des noirs sont lynchés par dizaines suite au braquage d’une banque commis par un bandit mexicain (espérons que les mexicains ne viennent pas à demander l’interdiction du bouquin pour ce personnage !). Certains diront peut être qu’Hergé a voulu redorer son image suite au portrait qu’il faisait des noirs dans Tintin au Congo. Pardon, mais au moment où il rédigea Tintin en Amérique, l’album Tintin au Congo n’avait pas encore fait polémique, ce n’est qu’après guerre que le scandale éclatera, donc on ne peut pas accuser l’auteur d’hypocrisie.

Hergé critique également de façon drôle et satirique l’industrie alimentaire du grand capitalisme.

Et oui, au final il tire un constat peu flatteur de la société américaine.  Il décrit un pays au final sans âme et sans histoire bâti sur la destruction d’un peuple. Il critique également le puritanisme et la corruption de cette utopie ultralibérale.

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Là ou certains y voient des « clichés offensants », je n’y vois personnellement qu’une critique satirique, juste et piquante de la société américaine (et non pas du peuple américain).

Tintin en Amérique est donc pour moi une très grande réussite. Les péripéties sont d’ailleurs beaucoup plus passionnantes que dans les précédents albums et suivent un cheminement plus logique. Les dessins sont de très bonne facture, mais seront là encore améliorés suite à la colorisation de 1946.

A noter qu’il est aussi possible que cet album marque la première apparition du personnage de Rastapopoulos lors d’un repas avec des personnalités. Le personnage présent sur la planche y ressemble énormément mais impossible de dire s’il s’agit clairement de Rastapopoulos.

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Au final, Tintin en Amérique est un nouveau petit chef d’œuvre d’Hergé et perso, je le considère même comme l’un de ses meilleurs albums et clairement comme l’un des plus profonds. Certes, il y’en aura toujours pour dire « C’est trop caricatural ». Et oui ! Tintin, comme Astérix par exemple, c’est de la caricature. Je terminerai donc sur cette phrase du brillant Paul-Eric Blanrue concernant cet album : « Vive Tintin et mort aux cons ! ». Pour finir, Tintin en Amérique est l’album de Tintin le plus vendu au monde.       

     

 

Note : 18/20

Les Cigares du Pharaon

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Catégorie : Bande dessinée

Genre : Aventure

Année : 1934 (noir et blanc) 1955 (couleur)

Nombre de pages : 62

Nation : Belgique

Auteur : Hergé

Synopsis : Tintin et son fidèle Milou sont partis faire une croisière vers l’Extrême Orient. Sur le bateau le jeune reporter fait la connaissance du farfelu professeur Philémon Siclone, un égyptologue sur la piste du tombeau d’un puissant pharaon nommé Kih-Oskh. Tintin décide de l’accompagner au Caire dans ses recherches. Mais l’aventure pourrait être dangereuse. Tous ceux qui ont entrepris de découvrir la sépulture du Pharaon Kih-Oskh ont disparu mystérieusement…   

Analyse critique :

(Attention SPOILERS)

Dans la lancée de notre cycle dédiéà Tintin, nous abordons désormais le quatrième Album de la série, Les Cigares du Pharaon.

Un album qui marque un tournant certain dans l’œuvre d’Hergé. En effet pour la première fois, l’aventure de Tintin n’est pas centrée sur un pays mais une quête qui amènera le reporter dans plusieurs endroits du globe, de l’Egypte vers l’Inde.         

C’est donc plus ou moins le premier album suivant une intrigue complète et un fil conducteur là ou les précédents livres décrivaient surtout une série d’aventures différentes.

On constatera également que cet album se veut plus « sage » que ces prédécesseurs. En effet, on ne voit ici aucune réelle critique de société ou de régime politique, Hergé se centre sur l’aventure de son personnage. On peut cependant voir au cœur de l’intrigue, le trafic d’opium qui faisait des ravages à l’époque, notamment en Inde.

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Mais en première partie on retrouve également les mythes de l’Egypte ancienne. Il paraît assez évident que concernant l’intrigue du pharaon Kih-Oskh, Hergé s’est inspiré de la trouvaille du tombeau de Toutankhamon et de la mystérieuse « malédiction » qui frappa les égyptologues qui mirent à jour cette sépulture. Clairement la légende de Toutankhamon plane sur cet album. Mais on verra qu’Hergé n’y donne aucune dimension mystique au final, et cet aspect légendaire ne fait que servir son intrigue principale concernant un vaste réseau de trafic d’opium.   

Concernant l’avancement de l’histoire, l’album est très bien construit et très bien rythmé. On rentre peu à peu dans l’aventure qui devient de plus en plus palpitante et riche en péripéties. On se trouve ici en face d’un scénario complet et travaillé qui amène Tintin vers de nouveaux horizons.

C’est aussi avec cet album que vont apparaître des tas de nouveaux personnages.

Premièrement le professeur Philémon Siclone, égyptologue farfelu, excentrique et distrait sur la piste du tombeau du Pharaon Kih-Oskh. Il finira par devenir fou, après avoir été empoisonné, et à se prendre pour le pharaon Ramsès II.

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On découvre ensuite Roberto Rastapopoulos, un producteur de cinéma visiblement d’origine grecque et milliardaire. Apparaissant d’abord comme un personnage particulièrement antipathique et peu fréquentable, il finit par donner un coup de pouce à Tintin dans sa quête. Officiellement il s’agit là de la première apparition du personnage, mais certains fans affirment qu’en réalité Rastapopoulos serait apparu dans Tintin en Amérique. Dans ce dernier album, on peut en effet voir un personnage ressemblant au protagoniste en question mais impossible de dire s’il s’agit bel et bien de Rastapopoulos.

Puis viennent surtout Dupond et Dupont. Dans la première version de l’album en noir et blanc, ils sont nommés X33 et X33 bis. Il s’agit là de leur première apparition. Certes on pourra me rétorquer que leur première apparition remonte àTintin au Congo où on les voit de façon très brève sans même avoir leurs noms. C’est à la fois vrai et faux, car s’ils sont bien dans la version colorisée, ils n’apparaissaient pas du tout dans la version originale en noir et blanc de 1931. Donc officiellement, Dupond et Dupont, ici appelés X33 et X33 bis, apparaissent pour la première fois dans cet album. Ce sont deux détectives qui sous leurs airs particulièrement sérieux, sont gaffeurs, naïfs et manipulables au possible. Ces deux personnages sont assez drôles car ils ne semblent presque pas humains, faisant passer leur devoir et la mission qui leur est confiée avant tout, même avant leur conscience. Ici ils sont convaincus que Tintin est un trafiquant de cocaïne et cherchent à l’arrêter par tous les moyens. Apparemment, la légende veut qu’Hergé se soit inspiré de son père et de son oncle qui étaient tous deux jumeaux. On pourrait aussi y voir l’influence de Laurel et Hardy. Le lecteur attentif, remarquera également que Dupond et Dupont se différencient par la forme de leurs moustaches, en forme de D pour le premier et en forme de T pour le second. On retiendra également la célèbre phrase « Je dirais même plus… ». 

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On aura également le personnage d’Alan Thompson qui apparaît ici. Là encore c’est sujet à controverses, puisque le personnage d’Alan n’apparaît que dans la version colorisée de 1955 et n’était pas présent dans la version originale en noir et blanc de 1932. Il s’agit d’un contrebandier de la Mer Rouge qui s’occupe de transporter l’opium.    

Le dernier personnage majeur est celui d’Oliveira da Figuera. Un marchand portugais qui a un sens du commerce et de la vente particulièrement affûté et développé. Il parvient notamment à convaincre Tintin d’acheter des tas d’objets inutiles.

Apparaîtra également le personnage du Fakir qui sera le méchant de cette histoire.

On pense également que le personnage du capitaine du boutre, qui se révèle être un trafiquant d’armes, serait inspiré de l’aventurier Henry de Monfreid.

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Les Cigares du Pharaon est donc une aventure riche et passionnante.

On peut cependant noter un anachronisme évident dans la version colorisée lorsque Tintin rencontre le Cheik Patrash Pasha et que ce dernier lui fait part de son admiration pour lui. Il lui montre en effet un album d’Objectif Lune, alors qu’à ce moment là, Tintin est loin d’avoir vécu cette aventure. Dans les versions noir et blanc, il s’agissait dans un premier temps de L’Album Tintin en Amérique, puis dans un second temps de Tintin au Congo.     

Les Cigares du Pharaon est donc un superbe album. Le scénario est remarquablement bien construit et beaucoup plus travaillé que dans les albums précédents. On a ici une intrigue longue, riche et palpitante. Ceci dit, Hergé a quasiment sacrifié toute critique ou satire de cet album.

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Les Cigares du Pharaon de par sa fin pouvait éventuellement appeler à une suite (notamment la mort du « Grand maître » dont on ne connaît jamais l’identité). Ce sera le cas avec Le Lotus Bleu.          

  

 

Note : 16,5/20

Le Lotus Bleu

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Catégorie : Bande dessinée

Genre :Aventure

Année :1936 (noir et blanc) 1946 (couleur)

Nombre de pages : 62

Nation : Belgique

Auteur :Hergé

Synopsis : Tintin continue à enquêter sur le réseau de trafiquants d’Opium depuis Rawhajpoutalah. Il reçoit alors un émissaire venu de Chine qui, juste avant d’être touché par une fléchette empoisonnée, a le temps de lui dire qu’on a besoin de lui à Shanghai. Tintin se rend sur place avec son fidèle compagnon Milou et devient bien vite la cible des trafiquants d’Opium, bien décidés à l’éliminer.   

Analyse critique :

(Attention SPOILERS)

Continuation de notre cycle Tintin avec Le Lotus Bleu soit le « bon élève ». En effet, cet album est souvent cité comme étant le contrepied de Tintin au Congo et Tintin aux Pays des Soviets, œuvres jugées racistes et propagandistes par une certaine intelligentsia.

Le Lotus Bleu, de son titre original « Les Aventures de Tintin, reporter, en Extrême-Orient », est donc la suite des Cigares du Pharaon. On pouvait deviner qu’il y’aurait une suite à ce dernier album étant donné certains éléments de la fin.

Pour cette aventure, Hergé choisit d’amener son héros toujours plus loin et notamment en Asie où il n’a jamais mis les pieds. Et l’égérie de l’Asie c’est quand même un peu la Chine. L’auteur l’annonce donc, publiquement, la prochaine aventure aura lieue en Chine.

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Il paraît qu’Hergé aurait reçu une lettre d’un aumônier des étudiants chinois de l’institut  de Louvain qui lui aurait demandé de se renseigner au maximum sur son sujet et de ne pas véhiculer les clichés européens sur les chinois afin de ne pas blesser ses étudiants. On se souvient d’ailleurs des caricatures peu flatteuses des chinois dans Tintin aux Pays des Soviets.

Hergé suivit cette lettre et effectua d’énormes recherches, c’est pourquoi cet album fut plus long àécrire. Pour sa quête il fut secondé par un des étudiants chinois de l’académie des Beaux-arts Zhang Chongren. Durant leur collaboration, les deux hommes devinrent de grands amis.

C’est dans ces conditions que fut conçu Le Lotus Bleu.

Tintin se retrouve donc embarquéà Shanghai pour tenter de démanteler une fois pour toute le réseau de trafiquant d’opium à l’origine des cigares du pharaon.

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Ce qui intéresse souvent dans Le Lotus Bleu, c’est que l’album est particulièrement marqué par le contexte politique de la Chine de l’époque. Une Chine ravagée par le trafic d’opium mais également en pleine tensions politique avec le Japon. L’auteur va même jusqu’à mettre sur planche une scène rappelant clairement l’attentat de Moukden qui déboucha sur l’invasion de la Manchourie par les japonais. Ici Hergé prend clairement le parti de la Chine alors qu’à l’époque la presse européenne de façon générale soutenait plus le Japon.

Hergé dénonce donc l’oppression japonaise sur la Chine de l’Epoque. Mais l’auteur dénonce aussi le racisme envers les chinois et les stéréotypes que s’en font les blancs. Il y’a cette scène mythique ou après avoir sauvé Tchang de la noyade, Tintin lui raconte avec amusement les clichés sur la Chine. Mais il aborde également le racisme envers les autres à travers certains blancs comme Gibbons et Dawson qui ont un mépris total pour les chinois et une haine farouche envers eux.

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Beaucoup y ont vu non seulement une dénonciation du racisme envers les asiatiques mais aussi une critique du colonialisme faisant le contrepied de Tintin au Congo. A y regarder de plus près ce n’est pas vraiment le cas. Hergé dénonce en fait ici l’impérialisme anglo-saxon, qu’il dénonçait par ailleurs déjà dans Tintin au Congo. Le colonialisme est quelque chose de typiquement européen, ici les racistes dominateurs et exploiteurs sont clairement identifiés comme des industriels américains. De même que dans la version originale, les soldats chargés de rosser Tintin sont britanniques et non indiens. On retrouve donc là la critique de l’impérialisme capitaliste et anglo-saxon que dénonçait déjà Hergé dans les albums précédents. En ce sens donc Le Lotus Bleu est beaucoup moins novateur que certains voudraient le faire croire, il suit le chemin logique de l’œuvre d’Hergé.

Mais une fois encore l’idée dominante reste l’oppression de la Chine par le Japon.     

 Il y’a donc un parti pris politique totalement assumé comme ce fut le cas pour ses œuvres précédentes. Sauf que pour les albums précédents, on appelle ça « propagande ». Il est d’ailleurs amusant de noter que les plus grands encenseurs du Lotus Bleu sont généralement les plus grands détracteurs de Tintin au Congo ou Tintin aux Pays des Soviets qu’ils accusent de colporter des clichés racistes. On constate que ces gens-là ne sont pas gênés des caricatures peu flatteuses concernant les japonais qui sont tous montrés comme des sadiques, dégénérés avec des dents longues. C’est d’ailleurs l’un des petits paradoxes du Lotus Bleu qui moque les clichés envers les chinois mais en use énormément envers les japonais. Personnellement, je pense qu’on peut caricaturer tout le monde, mais je constate que pour certains l’indignation concernant les caricatures, est à géométrie variable. 

          

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Mais on ne peut le nier dans sa restitution du contexte politique chinois de l’époque, Le Lotus Bleu est fascinant.

Mais c’est aussi l’occasion d’introduire de nouveaux personnages.

Parmi les méchants on trouvera le scélérat japonais Mitsuhirato. En grand « bad guy » Tintin avait pu déjà connaître Bobby Smiles dans Tintin en Amérique, mais avec Mitsuhirato on découvre un vrai ennemi juré. Un être vicieux et malfamé comme on en voit peu dans les BD. Mitsuhirato est vraiment un méchant d’envergure.

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Mais il n’est pas le seul, car c’est également ici que le personnage de Roberto Rastapopoulos tombe le masque. Ce dernier, apparu dans l’album précédent est ici dévoilé sous son vrai jour, il est « le grand maître » du trafic d’opium.

Il y’a aussi Dawson le chef de police corrompu.

Mais c’est surtout l’occasion de découvrir Tchang Tchong-Jen, un jeune chinois que Tintin sauve de la noyade et qui va l’aider dans sa quête. Tchang a tout du jeune garçon pur et courageux. Hergé s’est en fait inspiré de Zhang Chongren (dont le nom peut se prononcer justement Tchang Tchong-Jen) qui était désormais devenu un ami cher. Tchang sera donc si l’on peut dire le premier grand ami de Tintin humain (puisqu’il y’avait Milou).

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Mais Tintin se liera également d’amitié avec Monsieur Wang, le chef des fils du Dragon qui luttent contre les trafiquants d’opium.

On retrouvera également les Dupond-Dupont, les deux détectives gaffeurs toujours à la poursuite de Tintin.     

Le Lotus Bleu est donc très riche en aventure de même que sur son fond.

Sur le dessin, Hergé reste fidèle à lui-même dans la version originale en noir et blanc. Cela dit lors de la colorisation de l’album en 1946. Seuls les premiers dessins seront refaits mais le reste de l’album bien qu’en couleur, sera composé des mêmes dessins que la version noir et blanc.

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Le Lotus Bleu est parfois cité comme le meilleur album des Aventures de Tintin. Bien que je le considère comme l’un des plus réussis, ce n’est selon moi pas le meilleur non plus.

Quoiqu’il en soit, une grande réussite d’Hergé qui conclut magistralement le premier diptyque des Aventures de Tintin.   

  

 

Note : 18/20

L'Oreille Cassée

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Catégorie : Bande dessinée

Genre : Aventure

Année : 1937 (noir et blanc) 1943 (couleur)

Nombre de pages : 62

Nation : Belgique

Auteur : Hergé

Synopsis : Un fétiche arumbaya est volé au musée ethnographique. Dés le lendemain l’objet en question est mystérieusement restitué. Cependant Tintin effectuant un reportage sur l’affaire, constate que le fétiche original avait l’oreille cassée et que celui restitué a les deux oreilles intactes. Comprenant qu’il s’agit d’un faux, il se lance dans une enquête qui le mènera en Amérique du Sud au milieu d’une guerre entre deux états.   

Analyse critique :

(Attention SPOILERS)

Notre cycle Tintin continue avec L’Oreille Casséerédigée en 1937. Hergé vient de peaufiner son œuvre et de connaître un grand succès avec son diptyque Les Cigares du Pharaon et Le Lotus Bleu. Il enchaîne avec une nouvelle aventure, L’Oreille Cassée, une nouvelle BD très réussie.

L’Oreille Cassée est une aventure remarquablement bien dosée. Tout démarre à Bruxelles dans un  cadre calme et posée pour petit à petit aller vers l’aventure et les contrées les plus reculées de l’Amérique du Sud au fin fond de la forêt vierge.

Le début à Bruxelles est d’ailleurs l’occasion de découvrir la rue du Labrador où réside Tintin.

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Hergé nous entraîne donc dans une aventure palpitante à travers un album très riche. L’Oreille Cassée est même sans doute l’un des albums les plus riches de Tintin.

Tout comme pour Le Lotus Bleu, l’auteur s’est énormément renseigné et a bien travaillé son projet. Pour le fameux fétiche arumbaya emblème du livre, Hergé s’est inspiré des statues de la dynastie précolombienne. Ce qui n’a rien d’étonnant quand on découvre les origines de ce fétiche.

D’ailleurs, là encore, à l’instar du Lotus Bleu, L’Oreille Cassée est très marqué par le contexte politique de l’époque. Mais cette fois-ci, Hergé n’a plus l’intention de prendre de risques et choisit de situer son intrigue dans un pays fictif : le San Theodoros, un pays d’Amérique du sud déchiré par l’instabilité politique et une guerre civile entre le Général Alcazar et le général Tapioca.   

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L’auteur dresse ici un constat de l’instabilité politique de beaucoup de pays d’Amérique du Sud tous en proie à des révolutions sans changements. Il caricature cela avec beaucoup d’humour, lorsqu’on voit les soldats chanter la gloire de n’importe quel dirigeant qui vient de renverser le pouvoir. Mais la partie la plus intéressante reste le moment où une guerre éclate entre le San Théodoros et l’état voisin le Nuevo Rico (là encore, un pays fictif inventé par Hergé). En réalité, cet évènement de la BD fait référence la Guerre du Chaco entre la Bolivie et le Paraguay de 1932 à 1935.

Là encore Hergé démontre qu’il a bien étudié son sujet et tire tous les dessous de cette guerre dite « de territoire » qui fut en réalité mise en œuvre par les puissantes compagnies pétrolières américaines. Cette guerre fut d’ailleurs très meurtrière et causa près de 100 000 morts. Non seulement Hergé pointe du doigt la responsabilité des compagnies pétrolières dans cette guerre, mais aussi le commerce d’armes à travers le personnage de Bazil Bazaroff inspiré du célèbre marchand d’armes Bazil Zaharoff. Mieux que ça même, Hergé, nous montre les liens qui peuvent exister entre ces différents groupes qui se concertent pour créer une guerre dont ils profiteront. Il est donc sous entendu que les guerres sont le fruit d’oligarchies mondiales. En ce sens L’Oreille Cassée est un album visionnaire. On pourrait appliquer la situation de l’Amérique du Sud de l’époque à celle que vit actuellement le Moyen Orient dans des circonstances quelques peu différentes et plus radicales. 

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L’Oreille Cassée est donc à ce niveau un album très critique, sans doute même beaucoup plus que Le Lotus Bleu dont on chante tant les louanges.

Ensuite, L’Oreille Cassée nous emmène au cœur d’une forêt rappelant clairement la forêt  amazonienne. Ici, l’auteur s’est inspiré des tribus primitives pour donner naissance aux arumbayas et également aux bibaros, leurs ennemis.

On est donc épaté par la richesse d’un tel album.

Les personnages viennent d’ailleurs accentuer le tout.

On retrouvera brièvement les Dupondt au début de l’aventure.

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Mais on va surtout faire la connaissance de nouveaux protagonistes.      

Notamment le général Alcazar, personnage haut et en couleurs qui est le dirigeant du San Theodoros quand il n’est pas renversé par son rival le Général Tapioca. Il est difficile de définir la politique du Général Alcazar, mais on voit qu’il est parfaitement près à déclencher une guerre au service des compagnies pétrolières. On a donc affaire à un homme visiblement peu scrupuleux.

Nous découvrirons également Pablo, un bandit qui va finalement devenir l’allié de Tintin.

Ensuite nous avons Ridgewell, explorateur blanc porté pour mort qui s’est en fait intégréà la tribu des arumbayas. Ce personnage serait inspiré de l’explorateur Percy Fawcett ami de Sir Arthur Conan Doyle le célèbre auteur. Au final, on peut voir à travers ce personnage le constat d’Hergé sur notre société occidentale d’après première guerre mondiale. Société ou le blanc préfère partir vivre dans une tribu au fin fond de la forêt vierge en Amérique du sud.

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Mais l’album peut également s’appuyer sur deux très bons méchants que sont : Ramon Bada et Alonzo Perez. Deux sud-américains sans scrupules prêts à tout pour mettre la main sur le fétiche et à se débarrasser de Tintin. C’est le seul duo de méchant qu’on trouve dans Tintin et il fonctionne à merveille. Perez étant la tête pensante et Bada le bras armé dont la spécialité est le lancé de navaja (poignard), discipline où il est assez médiocre sortant sans cesse cette phrase qui deviendra culte « Caramba ! Encore raté ! ». On a donc deux très bons méchants.

On peut aussi citer l’apparition d’un nouveau personnage animal qui vient compléter Milou, Coco, le perroquet de monsieur Balthazar détenteur d’un précieux secret verbal.

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L’Oreille Cassée est donc un album très riche et qui plus-est très réussi. Les dessins sont une fois encore superbes. Cependant, lors de la colorisation du bouquin en 1943, les dessins, contrairement aux autres albums, ne seront pas refaits. On n’y perd rien au change car les couleurs sont somptueuses et d’un point de vue esthétique je trouve que c’est un très bel album.

Il y’a également pas mal d’humour et même une scène où l’auteur tourne en dérision son héros en le rendant ivre.

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Hergé réussit donc là un nouveau coup de maître, partant d’une histoire banale qui va gonfler pour s’enrichir sur le fond et aborder des tas de sujets.

Un must de la série tout simplement ! 

  

 

 

 

Note : 18,5/20

L'Île Noire

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Catégorie : Bande dessinée

Genre : Aventure

Année : 1938 (noir et blanc) 1943 (couleur)

Nombre de pages : 62

Nation : Belgique

Auteur : Hergé

Synopsis : Après avoir été blessé par les pilotes d’un avion en détresse non immatriculé, Tintin se rend en Angleterre pour retrouver ses mystérieux agresseurs. Il va alors découvrir la piste d’une bande organisée et dangereuse de faux monnayeurs. Mais sa quête va le mener vers l’Ecosse hantée par la légende de l’Île Noire. Un lieu maudit où tous ceux qui s’y sont aventurés ne sont jamais revenus.       

Analyse critique :

(Attention SPOILERS)

Aujourd’hui pour continuer notre cycle Tintin, je vous propose d’aborder L’Île Noire. Un album culte écrit et dessiné en 1938. Le mythe Tintin s’agrandit et Hergé amène son personnage vers de nouveaux horizons.

Finies les directions éloignées dans les pays exotiques, pour cet album, l’auteur choisit de situer l’action en Europe occidentale et plus précisément en Angleterre. On aura cependant une touche d’exotisme concernant la partie qui se déroule en Ecosse.

Ici donc, Tintin, suite à une agression, se retrouve sur la piste de faux monnayeurs.

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A ce niveau là, L’Île noire est assez attachée au contexte de l’époque. En effet, le trafic de fausse monnaie était très en vogue à l’époque. Cela dit, alors que les deux précédents albums : Le Lotus Bleu et L’Oreille Casséeétaient fortement marqués par le contexte politique et posaient vraiment un débat de fond, avec L’Île Noire, Hergé propose clairement un album plus léger. On oublie ici le contenu politique, philosophique ou analytique pour se concentrer avant tout sur l’aventure.  

Une belle aventure qui mélange habilement grand banditisme et épouvante mystique. Concernant L’Île Noire et ses ruines du château de Ben More, Hergé se serait inspiré du vieux château de l’Île d’Yveu.

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Ici, l’auteur donne également son point de vue sur les légendes et le mysticisme.

Ensuite, L’Île Noire est un album très bien rythmé ou tout démarre très rapidement sans qu’il n’y ait plus de temps mort jusqu’à la fin de l’album.

On a également une belle galerie de personnages.

On retrouvera Dupond et Dupont, toujours en train de poursuivre Tintin pour un crime qu’il n’a pas commis.

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Mais nous découvrirons également de nouveaux protagonistes, notamment parmi les méchants.

C’est en effet dans cet album que le Docteur Müller fait son apparition. D’emblée il s’impose comme un adversaire redoutable et impitoyable pour Tintin.

Mais on verra aussi apparaître un nouveau personnage animal à travers Ranko, un gorille de l’Île Noire que les bandits utilisent pour effrayer les curieux. Il est la bête de l’Île Noire et il pourrait bien être inspiré du célèbre King Kong apparu sur les écrans en 1933. King Kong et Ranko sont tous deux des gorilles vivant sur une Île étrange et ayant une aura mystique. Mais ici, on pourrait dire que le mythe de King Kong est tourné en dérision.

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Au niveau graphique, L’Île Noire est très bien travaillé, notamment sur l’esthétique. On n’oubliera pas Tintin, mythique dans son kilt écossais et avec son béret à pompon rouge. De même que les ruines sombres de l’Île Noire.

L’album sera colorisé en 1943 et les dessins seront tous refaits, donnant plus de puissance graphique à l’œuvre.

Un nouvel album très sympathique et riche en aventure, au détriment du fond qui reste très léger. Visiblement, Hergé a dédiéL’Île Noire au jeune public et a, avant tout, cherchéà faire une aventure simple et efficace    

 

 

 

Note : 15/20

Le Sceptre d'Ottokar

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Catégorie : Bande dessinée

Genre : Aventure

Année : 1939 (noir et blanc) 1947 (couleur)

Nombre de pages : 62

Nation : Belgique

Auteur : Hergé

Synopsis : Tintin fait la connaissance du professeur Halambique, spécialiste en sigillographie, qui s’apprête à faire un voyage en Syldavie. Visiblement, le professeur attire l’attention de malfrats, ce qui pousse Tintin à l’accompagner en Syldavie. Il va alors se retrouver sur la piste d’un complot qui cherche à en détrôner le roi Muskar XII en lui volant le sceptre d’Ottokar symbole et garant du pouvoir.   

Analyse critique :

(Attention SPOILERS)

Nous arrivons donc au huitième album d’Hergé, j’ai nomméLe Sceptre d’Ottokar. Cet album fut rédigé entre 1938 et 1939. Période de grands changements en Europe, puisque la seconde guerre mondiale se prépare. Le contexte transparaît d’ailleurs dans cet album. Si bien que beaucoup lui prête un débat qu’il n’a sans doute pas mais nous y reviendrons plus loin.

Après L’Île Noire, album plutôt léger, Hergé revient à quelque chose de plus sérieux et profond avec Le Sceptre d’Ottokar. Mais tout comme pour L’Oreille Cassée, il décide de ne plus se mettre en danger et de créer des lieux fictifs. En l’occurrence la Syldavie, un pays qu’on peut situer dans les Balkans et qui est le décor de cette intrigue. La Bordurie un autre pays fictif, voisin de la Syldavie, est également évoqué. Mais en réalité, ces deux pays ne sont pas vraiment le fruit de l’imagination d’Hergé qui s’est avant tout inspiré d’un livre paru en 1937 intituléGeneralized Foreign Policyécrit par un certain Richardson et qui mettait déjà en scène des pays intitulés Syldavie et Bordurie.

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Ici, il est surtout question de la Syldavie. Pays que va explorer Tintin et qui est dirigé par le roi Muskar VII. Depuis l’avènement de la monarchie et du règne d’Ottokar Premier, la Syldavie est resté attachée à une tradition sacrée. Le tenant du pouvoir doit détenir le sceptre pour gouverner et s’il venait à le perdre il serait déchu de son titre de roi et de son pouvoir. Telle fut la volonté du Baron Almazout alias Ottokar Premier. C’est alors que Tintin va découvrir l’existence d’un complot dirigé de la Bordurie pour ravir le sceptre au roi et faire un coup d’état en Syldavie.

Telles sont donc les grandes lignes de l’intrigue de cet album passionnant. Evidemment, le fond de cette BD fut interprété d’une certaine façon par l’intelligentsia. En effet, on a dit que le régime syldave et le règne de Muskar VII faisait référence au règne de Carol II en Roumanie, mais également que le pays lui-même était inspiré de l’Albanie ou de la Yougoslavie. On a aussi dit qu’Hergé dénonçait à travers cet album la montée d’une éminence fasciste en Europe et surtout le cas de l’Allemagne Nazie. Ce qui pousse à cette interprétation est le nom de l’instigateur du complot contre le roi de Syldavie, que Tintin découvre dans un document secret : Müssler. Beaucoup ont vu à travers ce nom la contraction des noms Mussolini et Hitler, tous deux alliés à l’époque. Ainsi, Hergé traiterait ici de l’Anschluss et dénoncerait la menace fasciste contre les démocraties européennes, ce qui démontrerait qu’il aurait coupé tous ses liens avec l’extrême droite belge et notamment le rexisme, mouvement politique de Léon Degrelle. Cela ferait donc du Sceptre d’Ottokar, l’album « le plus engagé d’Hergé » avec Le Lotus Bleu.

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C’est en tout cas ce qu’en dit Wikipédia, site partial où l’on trouve malheureusement tout et n’importe quoi. Cependant, il est clair que des signes interrogent. Il est assez plausible que Müssler soit le mélange de Mussolini et Hitler et qu’Hergé dénonce donc là un Anschluss tel qu’on nous l’apprend aujourd’hui dans les livres d’histoires officiels. Hergé fait probablement référence à l’Anschluss de l’Autriche et de la Tchécoslovaquie. Il semble donc là bien dénoncer l’Allemagne Nazie.

 

Cela veut-il donc dire qu’Hergé s’est détourné de l’extrême droite nationaliste et la dénonce à présent ? Ainsi que la montée d’une éminence fasciste en Europe ? Et que par la même Le Sceptre d’Ottokar est un album très engagé ? C‘est là où certains vont extrêmement vite en conclusions hâtives.  Et c’est sans doute une récupération un peu facile. Pour ma part j’ai toujours trouvé cette thèse gentiment ridicule et amusante au vu des faits qui entourent Hergé.

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Premièrement concernant le pseudo engagement de l’album qui serait digne du Lotus Bleu, resituons les choses dans leur contexte. Le Lotus Bleu prenait des positions pro-chinoises, à l’époque où la grande majorité des médias occidentaux étaient plutôt pro-japonais. Or, ici toute la presse belge, française, anglaise dénonçait clairement l’Allemagne nazie et son régime. En ce sens, Hergé se faisait simplement l’écho de son temps. Ajoutons qu’à l’époque, le climat était très tendu et si vous ne crachiez pas sur le régime nazi, si vous vous disiez neutre ou opposéà une guerre contre l’Allemagne Nazie, vous étiez taxé de « monstre nazi assoiffé de sang ». Mais surtout, il n’y a en fait aucune preuve réelle que Müssler fasse référence au Duce et au Führer. Mais admettons…  

 

Hergé dénonce t’il une émergence fasciste grimpante en Europe ? C‘est là encore oublier le contexte, puisque nombreuses étaient les républiques fascistes en Europe à l’époque, donc difficile de parler d’ « émergence fasciste ». Mais surtout, l’auteur dénoncerait t’il ici l’extrême droite nationaliste dont il a lui-même fait partie jadis ? Ce qui tendrait à prouver qu’il est devenu démocrate ? Là encore c’est une récupération un peu facile. Mais quiconque connaît le personnage d’Hergé et a un minimum d’honnêteté sait que c‘est faux. 

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Premièrement il n’existe aucun lien ou aucune source qui indique qu’entre 1938 et 1939 Hergé s’était détaché du rexisme. Ce qui serait censé le démontrer selon certains, c’est qu’Hergé dénonce ici Hitler et par raccourci sa politique proche des idéologies du rexisme. Ce qu’il faut rappeler, c‘est que si effectivement par la suite le rexisme a collaboré avec le nazisme, il fut farouchement antinazi vers le milieu des années 30. IL y'avait notamment une opposition dans la vision catholique du rexisme qui ne collait pas avec le nazisme. Ensuite, même avant la guerre et contrairement aux idées reçus, les nationalistes conservateurs, dont faisaient partis Hergé, défendaient avant tout la patrie et voyaient par conséquent d’un mauvais œil une Allemagne qui menaçait d’envahir. Hergéétait un conservateur catholique attachéà la Monarchie. Par conséquent, si on regarde l’album, on retrouve bien là l’histoire d’une monarchie menacée.

Difficile donc de voir là un parti pris démocrate ou républicain. J’ajouterais également un autre fait évoqué par Olivier Mathieu qui a connu Hergé. Le passage dans le musée où Milou dérobe un os à un squelette de diplodocus, est tiré d’une photographie du musée de Berlin prise en 1938 et qui comprenait originalement deux teintures ornées de croix gammées. Cette photographie était en fait parue dans le journal « Le Patriote » Illustrée le 16 janvier 1938. Hergéétait donc au moment de l’écriture coutumier des journaux nationalistes dits d’extrême droite. 

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Mais surtout rappelons qu’à la fin de la guerre Hergé fut arrêté et emprisonné pour faits de collaboration. Il rédigea notamment pour le célèbre journal collaborationniste « Le Soir ». Il échappa de peu au peloton d’exécution, mais cela démontre que Le Sceptre d’Ottokar (qui ne fut d’ailleurs jamais interdit pendant l’occupation) n’a pas vraiment été un élément témoignant d’un parti pris antinazi pour Hergé, même à l’époque.  Bref, difficile donc de voir à travers Le Sceptre d’Ottokar un pamphlet contre le fascisme et un album engagé. Surtout au vu des prises de positions d’Hergé par la suite et même au moment des faits comme en témoignent plusieurs de ses œuvres d’époque. On peut sans doute y voir un album évoquant de façon indirecte le contexte de l’époque et les inquiétudes qui en découle, mais certainement pas un parti démocrate et « antifasciste », on n’y perd cependant rien au change.  

 

Premièrement, d’un point de vue graphique, l’album est très réussi et très beau. Pour la version colorisée de 1947 d’ailleurs, les dessins furent largement modifiés et le rendu est absolument sublime. Hergé fut aidé de son fidèle collaborateur E.P. Jacobs. 

 

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L’intrigue est très bien construite et amenée mais également très riche en détail et en rebondissements. De même que le rythme est soutenu.

Ensuite nous avons également droit à une belle galerie de personnages. On retrouvera notamment Dupond et Dupont les deux détectives maladroits. Ici changement, puisqu’ils ne poursuivent pas Tintin pour un crime qu’il n’a pas commis mais l’aident au contraire (tant bien que mal) dans sa quête.

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On aura également de nouveaux visages comme le Professeur Halambique, le roi Muskar VII et le Colonel Boris, officier félon qui complote contre le roi pour le compte de Müssler.

Mais c’est surtout dans cet album qu’apparaît pour la première fois la célèbre cantatrice Bianca Castafiore, dont la voix est comme un ouragan. La Castafiore nous rappelle à quel point Hergé n’est pas vraiment tendre avec les femmes dans son œuvre. Elle est également accompagnée de son pianiste monsieur Wagner et sa bonne Irma.

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Des personnages hauts et en couleurs qui apportent à l’intrigue, alors que notre jeune reporter affirme toujours autant sa personnalité.

Le Sceptre d’Ottokar est donc un album très intéressant et vraiment passionnant.

Une nouvelle réussite pour Hergé                            

  

 

 

Note : 17/20

Le Crabe aux Pinces d'Or

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Catégorie : Bande dessinée

Genre : Aventure

Année : 1940 (noir et blanc) 1943 (couleur)

Nombre de pages : 62

Nation : Belgique

Auteur : Hergé

Synopsis : Tintin aide les détectives Dupond et Dupont qui enquêtent sur la mort mystérieuse d’un marin. Il finit alors par se retrouver sur la piste d’un vaste et puissant réseau de trafiquants d’opium. Ce périple le mènera en haute mer, en plein cœur du Sahara et dans un port marocain.

Analyse critique :

(Attention SPOILERS)

Continuation du cycle Tintin avec Le Crabe aux Pinces d’Or. Un Album très important parfois cité comme l’un des meilleurs de la série.

Pour l’anecdote, il paraît qu’Hergé pensa un moment nommer cet album « Le Crabe Rouge » pour ainsi créer une continuité avec les albums précédents : Le Lotus Bleu et L’Île Noire. Mais cette idée arriva trop tard, les éditions étaient déjà en cours.

Il faut aussi savoir que cet album a étéécrit entre 1939 et 1940, dans une Belgique occupée. Hergé devait donc concevoir une histoire qui soit parfaitement neutre. C’est pourquoi on retrouvera très peu d’allusions politiques dans Le Crabe aux Pinces d’Or voire aucune.  

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Tout part en effet d’une boîte de crabe retrouvée et qui serait la pièce à conviction de la mort mystérieuse d’un marin.

De là, Tintin va s’embarquer dans une folle aventure jusqu’au Maroc pour démanteler un réseau de trafic d’opium.

L’intrigue est au final assez basique et banale. Ce n’est pas la première fois que Tintin suit la piste d’un réseau de trafiquants d’opium, j’en renvoie aux Cigares du Pharaon et au Lotus Bleu. Mais le cheminement de l’histoire est bien amené et le tout remarquablement ficelé.

Mai surtout, cet album marque l’apparition de nouveaux personnages majeurs.

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On aura notamment Allan Thompson, le méchant de l’album qui est le lieutenant du Cargo Karaboudjan et l’un des chefs du trafic d’opium. Il marque ici sa première apparition. Certains me diront que ce personnage apparaissait déjà dans Les Cigares du Pharaon. C’est vrai pour les versions colorisées mais faux pour les versions originales en noir et blanc. Allan apparaît ici comme un farouche adversaire implacable, dur et sans scrupules.

On découvrira également le personnage d’Omar Ben Salaad, moins respectable qu’il n’y paraît.

Mais la grosse apparition de cet album c’est bien sûr celle du capitaine Haddock. Grand officier du Karaboudjan, il a un faible notable pour l’alcool. Faible que son lieutenant Allan exploite à merveille pour faire ce qu’il veut à bord du cargo. Le Capitaine Haddock en découvrant le trafic d’opium qui se déroule dans ses calles à son insu va donc prendre le parti de Tintin et devenir son compagnon de fortune. Evidemment, cette rencontre est absolument mythique. Et à elle seule, elle signifie l’importance de l’album. Désormais il y’aura un avant et un après Le Crabe aux Pinces d’Or dans l’histoire de Tintin.

3

Pourquoi le capitaine est-il devenu si mythique et aussi rapidement ? Car en réalité, malgré son folklore verbal et son côté extravagant par moment, le capitaine Haddock n’est pas un stéréotype comme Tintin. C’est certes une caricature, mais une caricature humaine de plusieurs défauts justement tellement humains. Le Capitaine Haddock n’a pas l’esprit chevaleresque de Tintin, il perd souvent son sang froid et pique des colères excessives, il est alcoolique et a souvent du mal à céder à la tentation, il manque de patience… Mais il faut dire aussi qu’il lui tombe pas mal de tuiles sur la tête au final. Quoiqu’il en soit, est-il vraiment nécessaire de présenter encore ce personnage tellement ancré dans la culture populaire ? Haddock est avant tout une bonne grosse dose d’humour en plus apportée à l’univers de Tintin.

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Mais le mythe du capitaine Haddock vient également et énormément de son langage. Un argot très développée et riche en loufoqueries. « Mille millions de mille sabords ! »« Tonnerre de Brest ». Mais surtout ces insultes (qui n’en sont d’ailleurs pas vraiment) : «Bachi Bouzouk, Ectoplasme, Marin d’eau douce, Cyanure, Tchouk-tchouk nougat, Phylloxera, anthropopithèque, bois sans soif, Analphabète, Moule à Gaufres… » Impossible de tout énumérer il doit y avoir plus de deux cents mots propre au capitaine Haddock. Il faut aussi savoir qu’il y’avait dans les versions originales des albums, des insultes qui furent retirées par la suite comme : « Fatma de Prisunic » ou encore « Commerce noir ». Le langage du capitaine fait désormais partie du folklore de l’univers de Tintin mais au final d’où vient-il ? Des fans se sont évidemment posé la question ? Où Hergé a-t-il puisé son inspiration pour le langage si argotique et particulier du capitaine Haddock ? C’est cette question qui a fait surgir de nouvelles polémiques autour de l’œuvre de Tintin. En effet en 2004, Emile Brami dans son livre Céline, Hergé et l’affaire Haddock a établit une théorie pour le moins surprenante. Selon lui, le dialecte loufoque et extravagant du Capitaine Haddock aurait été directement inspiré du célèbre pamphlet du génial Louis Ferdinand Céline, Bagatelles pour un Massacre, livre interdit de publication depuis la fin de la seconde guerre mondiale (et que nous aurons sûrement l’occasion d’aborder ici).

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Une théorie qui sera violemment controversée mais qui pourtant tient largement la route. Si certains mots employés par le personnage d’Haddock peuvent se retrouver dans d’autres œuvres de l’époque, très nombreux sont ceux que l’on retrouve uniquement dans l’œuvre de Céline. Comme par exemple : « Sapajou, Iconoclaste, noix de coco, aztèque, Cromagnons, incas à plumes, Vampires… ». La parution de Bagatelles pour un Massacre précède de peu celle du Crabe aux pinces d’Or. Certains ont déclaré qu’Hergé lisait peu de livres et que par conséquent, il n’aurait jamais lu du Céline. Et pourtant, tous deux avaient un ami commun en la personne de Robert Poulet qui travaillait au journal collaborationniste « Le Soir », oùétait publié« Les Aventures de Tintin », et où avait été rédigé plusieurs articles sur Bagatelles pour un Massacre par Poulet lui même. Bien évidemment, on a surtout noté le caractère anti-juif de Bagatelles pour un Massacre, c’est de là que vient la polémique. Il faut savoir cependant que plusieurs dessins et caricatures d’Hergé, démontrent que le créateur de Tintin ne portait pas vraiment la communauté israélite dans son cœur, donc le lien est loin d’être surréaliste. Certes, il n’existe aucune preuve formelle, mais c’est une théorie intéressante et loin d’être loufoque. Une fois encore elle tient la route. Quoiqu’il en soit le Capitaine est devenu mythique dés cet album.

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Quant au personnage de Milou, on peut aussi noter une évolution. On l’a vu depuis le premier album, Milou est un chien doué de parole. On l’a même vu avoir de courts échanges avec Tintin. Pourtant plus on avance dans l’œuvre plus sa voix semble devenir intérieure. Milou parle à l’intérieur de lui et Tintin ne semble plus vraiment l’entendre. Le langage de Milou ne paraît désormais accessible qu’au lecteur.

Il faut aussi savoir que l’album sera également censuré par les distributeurs américains. Notamment sur les scènes de beuverie du capitaine Haddock, mais également sur les traits raciaux de certains personnages. Comme par exemple Jumbo, et le bourreau du capitaine qui passeront de peau noire à peau blanche.

De même que lorsque le capitaine poursuit son bourreau la phrase « il faut arrêter ce nègre ! » deviendra : « il faut arrêter cet homme ! ».

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Au niveau du dessin, c’est là encore superbe, notamment dans la version colorisée de 1943.

Depuis lors, Le Crabe aux Pinces d’Or est tout simplement devenu l’un des albums les plus cultes de la série et également celui qui fit l’objet du plus grand nombre d’adaptations sur l’écran. Il est souvent cité comme l’une des meilleures aventures de Tintin.

En tout cas c’est certain, dans l’univers de Tintin, il y’aura un avant et un après Le Crabe aux Pinces d’Or.

A lire absolument !

                        

Note : 18/20


L'Etoile Mystérieuse

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Catégorie : Bande dessinée

Genre : Aventure

Année : 1942

Nombre de pages : 62

Nation : Belgique

Auteur : Hergé

Synopsis : Tintin est intrigué par l’apparition d’une nouvelle étoile dans le ciel. Il décide d’en faire part à l’observatoire qui lui annonce qu’il s’agit là d’une météorite qui va entrer en collision avec la terre entraînant ainsi la  fin du monde. En réalité seul un morceau s‘échouera sur la terre et plus précisément dans l’océan arctique. Une expédition est alors organisée pour partir à la recherche du fragment.  

Analyse critique :

(Attention SPOILERS)

Nouvel article de notre cycle Tintin avec L’Etoile Mystérieuse rédigé en 1942. L’Etoile Mystérieuse fait date dans l’histoire des aventures de Tintin puisqu’il s’agit du premier album édité directement en couleur. Enfin… A vrai dire, l’album sera préédité en noir et blanc dans les pages du journal « Le Soir », avant d’être finalement édité complètement en couleur sous format d’album.

L’Etoile Mystérieuse est une aventure très bien construite. Tout commence par la découverte d’une nouvelle étoile par Tintin, nouvelle étoile annonçant la fin du monde. L’album prend alors d’entrée de jeu une tournure sombre. On va vivre avec Tintin la fin du monde et franchement, Hergé a très bien imaginé cela.

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Mais au final on découvrira que Tintin ne faisait que rêver endormi dans son fauteuil. Cela dit, son rêve n’était pas tellement éloigné de la réalité, puisqu’effectivement un morceau de bolide s’est écrasé sur la terre et plus précisément en Arctique, provoquant ainsi un tremblement de terre. C’est alors que s’organise une expédition en Arctique pour retrouver l’aérolithe. Tintin prend part à cette expédition scientifique dans le navire polaire « Aurore » pour représenter la presse. Cependant ils ne sont pas les seuls à rechercher l’aérolite, une bande organisée puissante de Sao Rico a également lancé une expédition qui compte bien devancer l’Aurore par tous les moyens pour atteindre l’aérolithe. Une course s’engage…

L’Etoile Mystérieuse est donc un album très intéressant. Premièrement, l’intro est superbe. Hergé introduit ici le monde du rêve et semble évoquer comme un lien entre ce monde et celui de la réalité. En l’occurrence, Tintin vit en rêve une version métaphorique de la réalité. Ce point de vue est donc intéressant.

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Ensuite, l’intrigue de cette expédition scientifique en Arctique était à la mode à l’époque. Certains ont d’ailleurs vu dans cette aventure l’influence de l’œuvre de Jules Vernes. On pourrait surtout la voir sur la fin, lorsque pleins d’évènements insolites se produisent sur l’aérolithe. Le rythme est d’ailleurs plutôt bien soutenu et on se laisse entraîner dans cette véritable course.

Il faut cependant savoir que L’Etoile Mystérieuse fut un album polémique qui a été censuré notamment après la Libération. En effet, à la base Hergé ciblait directement dans son album la haute finance américaine et plus précisément Wall Street. C’est pourquoi le bandit qui finançait l’expédition Peary était un banquier juif de New York du nom de Blumenstein. A travers son visage se lisait d’ailleurs la caricature typique de l’israélite. De même que dans l’album on trouve des caricatures sur les juifs qui furent elles aussi censurées et supprimées après la Libération. Evidemment ces dessins ont fait polémiques. Or ce n’est un secret pour personne : Hergé ne portait vraiment pas les juifs dans son cœur, comme en témoignent plusieurs de ses œuvres passées.

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Ici donc, l’album sera revu et corrigé. Le nom du banquier Blumenstein sera changé et on n’évoquera plus New York ou les Etats Unis mais le Sao Rico un pays fictif, un de plus, inventé par Hergé. Cela dit les allusions à au judéo-américanisme n’ont pas totalement disparues, puisque le méchant est rebaptisé Bohlwinkel qui en argot bruxellois signie "magasin de bonbons" un nom d’apparence moins suspect. Mais en réalité Bohlwinkel est également un nom juif et ici Hergé, volontairement ou pas, n'a fait que remplacer une kippa par une autre. Ensuite le drapeau américain apparaît encore sur le Peary à certaines cases de la BD.

En l’occurrence, Hergé représente ici une entité financière puissante et sans scrupules qui contrôle absolument tout.

D'ailleurs au sujet de ces passages de l'album qui ont été enlevé, Hergé, avec beaucoup d'humour avait écrit au dos de l'original "supprimé pour excés de réalisme".  

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Concernant les personnages maintenant, c’est avec  grand plaisir qu’on retrouvera le Capitaine Haddock en tant que commandant de l’Aurore.

Mais c’est aussi l’apparition de nouveaux personnages, comme le capitaine Chester, ami du capitaine Haddock. Ce personnage sera d’ailleurs par la suite seulement évoqué de nom.

On découvre aussi le professeur Calys, scientifique hystérique qui est le cerveau de l’expédition. Mais Hergé offre également une liste de scientifiques probablement inspirés de personnalités de l’époque. On notera notamment la présence du professeur Cantonneau qui reviendra par la suite dans les aventures de Tintin.

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On peut aussi noter Philippulus le prophète, personnage complètement fou et fendard annonçant la fin du monde.

Concernant l’esthétique de l’album, c’est du très beau travail. Hergé nous offre de nouveaux horizons avec ces paysages d’Arctique et visuellement il faut bien avouer que ça en jette.

L’Etoile Mystérieuse est donc un album très réussi et assez brillant.

Une nouvelle grande aventure de Tintin

                                      

Note : 17/20

Le Secret de la Licorne

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Catégorie : Bande dessinée

Genre : Aventure

Année : 1943

Nombre de pages : 62

Nation : Belgique

Auteur : Hergé

Synopsis : Tintin achète une maquette de bateau au vieux marché. Mais suite à cet achat, il est cambriolé. Il découvre que la maquette en question a plus d’importance qu’elle n’y paraît. En effet, elle représente le navire « La Licorne » qui fut jadis commandé par l’ancêtre du capitaine Haddock. La Licorne fut prise par Rackham le Rouge, un pirate sanguinaire qui y entassa son butin. La maquette serait-elle une des pièces du puzzle pouvant mener au trésor ?   

Analyse critique :

(Attention SPOILERS)

Aujourd’hui nous abordons l’une des plus célèbres aventures de Tintin, Le Secret de la Licorne. Cet album rédigé en 1943 est le premier d’un diptyque dont l’intrigue tournera autour de la recherche du trésor perdu du pirate Rackham Le Rouge.   

Le Secret de la Licorne prend plus ou moins le contrepied des albums précédents. Tintin est allé aux quatre coins du monde. En Russie, En Afrique, En Amérique, en Asie, au Moyen Orient, aux Balkans en Angleterre et même en Arctique ! Cette fois-ci, fini les grandes escapades, Tintin reste à Bruxelles en Belgique pour cette aventure. C’est là que demeure l’originalité de ce nouvel album. Ce qui ne veut pas dire que l’aventure sera moins palpitante. Elle est même réellement attrayante ! Franchement le décor où on nous place est l’égérie de l’univers de Tintin. La rue du Labrador où réside le jeune reporter, mais surtout ce vieux marché du début.  

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Bref un décor superbe et une bonne ambiance. En réalité, Le Secret de la Licorne est un album malin car il met du coup cette aventure de chasse au trésor à portée de main de tous lecteurs. L’aventure n’étant pas extravagante, on peut très bien s’imaginer à la place de Tintin enquêter sur la piste du trésor.     

Au niveau des personnages, outre Tintin et Milou, nous retrouverons donc avec plaisir le Capitaine Haddock toujours aussi fendard. Le personnage prend ici beaucoup plus d’épaisseur car il est liéà l’intrigue. En effet on découvre que le capitaine a un ancêtre, le Chevalier François de Hadoque, un corsaire qui dirigea le navire La Licorne sous le règne de Louis XIV. Ce dernier fut confrontéà l’un des plus terribles boucaniers de l’époque : le pirate Rackham Le Rouge. Il finira par le vaincre et par s’emparer de son trésor qu’il cacha on ne sait où. Tout du moins, le chevalier laissa des indices pouvant mener au trésor. Le Chevalier de Hadoque est au final une copie conforme du Capitaine Haddock version fin du XVème siècle. Cette descendance tendra à démontrer plus tard que le capitaine Haddock a des origines issues de l’Aristocratie. Certains virent là la marque du côté monarchiste et conservateur d’Hergé.

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Les nouveaux personnages sont donc également nombreux.

Nous avons bien sûr Rackham le Rouge le pirate cruel et sanguinaire qui est probablement inspiré du pirate « Calico » John Rackham.

Puis nous avons Monsieur Sakharine, un collectionneur de maquette de bateaux qui jouera un rôle certain dans l’aventure.

Nous aurons également Aristide Filoselle, un fonctionnaire retraité reconverti dans un drôle de boulot.

Mais surtout nous découvrirons les frères Loiseau, deux ennemis acharnés et implacables de Tintin qui sont prêts à tout pour mettre la main sur le trésor de Rackham Le Rouge.

On retrouvera aussi avec plaisir deux autres frères, Dupond et Dupont. Les deux détectives gaffeurs deviennent vraiment attachants à partir de cette aventure. Chargés de traquer un audacieux pickpocket, ils en seront en fait les victimes favorites. 

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Pour en revenir au décor de l’album, c’est également dans cet épisode qu’apparaît pour la première fois le château de Moulinsart. Il est ici le domaine et le repère des frères Loiseau. Cela dit, on n’a ici aucune vue d’ensemble du château mais seulement des parties qui ne permettent pas encore de cerner l’influence d’Hergé. Le Château de Moulinsart permet également d’introduire un autre nouveau personnage : Nestor, le majordome des frères Loiseau qui ignore en fait tout des activités criminelles de ses maîtres.  

Sur le plan esthétique cette BD et ses dessins sont superbes. Le plus beau reste probablement la vision de l’histoire du Chevalier de Hadoque qui se déroule à la fin du XVème siècle. Hergé se plaît alors à dessiner de superbes navires et des costumes d’époques (bien que très folklorique en l’occurrence). On sent aussi qu’il s’est bien renseigné sur le monde marin de l’époque pour donner du crédit à son histoire.

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Les personnages prennent également de l’épaisseur et Hergé gère toujours mieux le cheminement des intrigues. En revanche, mis à part l’histoire de pickpocket, difficile de trouver un rapport avec le contexte sociopolitique de l’époque. Cela dit, l’album ayant été rédigé sous l’occupation en période de guerre, il devait rester neutre.

Le Secret de la Licorne reste donc une nouvelle très grande réussite d’Hergé et un des albums les plus populaires de la série.      

                                          

Note : 18/20

Joyeux Noël

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E-Pôle-Art vous souhaite à tous un Joyeux Noël !!!

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Le Trésor de Rackham le Rouge

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Catégorie : Bande dessinée

Genre : Aventure

Année : 1944

Nombre de pages : 62

Nation : Belgique

Auteur : Hergé

Synopsis : Tintin et le Capitaine Haddock savent désormais l’endroit où a coulé la Licorne, le fier navire du Chevalier de Hadoque, dans lequel se trouve sûrement le trésor du pirate Rackham Le Rouge. Ensemble, ils décident alors d’organiser une expédition de recherche. Ils s’engagent à bord du bateau Sirius, vers les Caraïbes pour découvrir l’épave de la Licorne et mettre la main sur le Trésor de Rackham Le Rouge. Mais l’aventure ne sera pas sans danger…  

Analyse critique :

(Attention SPOILERS)

Après avoir abordéLe Secret de la Licorne, l’un des albums les plus cultes de Tintin, nous abordons logiquement sa suite Le Trésor de Rackham Le Rouge. En effet les deux albums forment un diptyque tournant autour de la recherche d’un pirate de la fin du XVème siècle.

Le Secret de la Licorneétait une aventure qui n’était pas sorti du cadre géographique de Bruxelles, une des originalités de la série. Mais désormais avec ce second album, il est temps de reprendre le large ! Cette fois, Tintin, Milou et le Capitaine, vont devoir s’aventurer dans les Caraïbes pour découvrir l’épave de la Licorne et le trésor de Rackham le Rouge.

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On retrouve donc ici le côté« grande aventure ». Pourtant contrairement à ce que laisse sous-entendre le début de la BD, Tintin ne sera pas ici confrontéà des « méchants ». Aucune organisation, ni aucun super-vilain pour barrer désormais la route de nos héros. Pour autant le danger sera bien là en mer. Entre les requins, la flore sous-marine, la jungle épaisse de l’île du Chevalier et les problèmes techniques, nos aventuriers ne sont pas au bout de leurs surprises !

Au niveau du visuel c’est un album remarquablement travaillé. C’est la première fois qu’Hergé s’attache à vraiment représenter le monde sous marin. L’Epave de la Licorne est juste superbe. De même que l’île sur laquelle a vécu le Chevalier de Hadoque avec son fétiche et sa croix.

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Hergé nous en met donc plein la vue et ce n’est pas fini. Car Le Trésor de Rackham Le Rouge introduit également un nouveau personnage qui va marquer l’univers de Tintin. Il s’agit du professeur Tryphon Tournesol. Un scientifique farfelu créateur de tas d’invasion, comme une machine à brosser les vêtements, un lit-placard mais surtout un Sous-marin de poche en forme de requin. C’est cette ultime invention qu’il compte expérimenter au profit de cette expédition. Le professeur Tournesol est en réalité inspiré du scientifique suisse Auguste Piccard qui à l’époque était surtout connu pour avoir exploré la haute atmosphère. Hergé fut plus ou moins visionnaire car quatre ans après Le Trésor de Rackham Le Rouge Piccard a conçu un bathyscaphe pour explorer les très grandes profondeurs. Le professeur Tournesol va bien vite devenir mythique de par son côté farfelu et distrait et surtout sa surdité légendaire qui fait littéralement péter les plombs au capitaine Haddock.  

Le Sous marin du professeur est d’ailleurs devenu particulièrement mythique dans l’univers de Tintin. Une vraie trouvaille de la part d’Hergé.

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Pour en revenir aux personnages, on sera également très heureux de retrouver nos gaffeurs de service : Dupond et Dupont.

L’aventure du Trésor de Rackham Le Rouge est donc très riche. Certes tout comme son prédécesseur, tout contexte politique est ici banni. On a rien perdu au change au final.

Pour info c’est également dans cet album qu’apparaît pour la première fois la vue extérieure complète du château de Moulinsart. On pouvait déjà voir ce lieu dans Le Secret de la Licorne, mais ici on découvre sa vue complète qui permet de remarquer que cet endroit est en fait inspiré du Château de Cheverny. Ce lieu va par la suite devenir le port d’attache de Tintin et de ses amis.

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Un album très culte donc, qui complète à merveille Le Secret de la Licorne. Il s’agit d’ailleurs du diptyque le plus vendu des aventures de Tintin.

Un incontournable.                                                            

 

 

Note : 17,5/20

Bonne Année 2016

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E-Pôle Art vous souhaite à tous une bonne année 2016 !!!

 

Merci pour votre fidélité !

Les 7 Boules de Cristal

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Catégorie : Bande dessinée

Genre :Aventure

Année :1948

Nombre de pages : 62

Nation : Belgique

Auteur :Hergé

Synopsis :L’expédition archéologique Sanders-Harmuth rentre des Andes d’où elle a ramené la momie Rascar Capac. Mais suite à cela, les membres de l’expédition semblent tous être frappés d’un mal mystérieux. Ils tombent dans une profonde léthargie inexplicable. Serait-ce là l’œuvre de la « malédiction divine » de Rascar Capac ? Tintin et ses amis sont bien décidés à enquêter et ils ne sont pas au bout de leurs surprises.    

Analyse critique :

(Attention SPOILERS)

Continuation du cycle Tintin avec Les 7 Boules de Cristal soit l’un des albums les plus cultes de la série. A cette époque, Hergé vient déjà de pondre une magnifique aventure en diptyque Le Secret de la Licorne et Le Trésor de Rackham Le Rouge. Ce duo a rencontré un franc succès et dans les années 40, Hergé décide de rédiger une nouvelle aventure, elle aussi en diptyque.

La première pierre de ce diptyque sera Les 7 Boules de Cristal. Le contexte de la publication sera tendu. En réalité, Hergé commence à pré-publier cette aventure dans le journal Le Soir entre 1943 et 1944. Mais le 3 septembre 1944, les troupes alliés pénètrent dans Bruxelles, bloquent les rédactions et interdisent notamment à ceux qui ont continué d’exercer pendant l’occupation de publier encore. L’aventure sera donc interrompue. A la fin de la guerre, Hergé est accusé de collaboration. Il échappera de peu au peloton d’exécution. La légende veut qu’il doive la vie à un juge qui lui aurait dit : « Si je vous fais fusiller, mes enfants ne m’adresseront plus la parole ». D’ailleurs à ce propos une planche de l’album montre une étoile de David représentée derrière une chauve souris. A l’époque, certains jugèrent ce dessin antisémite. Il n’y avait pas de quoi, on peut même penser légitimement qu’Hergé ne cherchait même pas à représenter l’étoile de David, mais ce fut sans doute son antijudaïsme de notoriété publique qui conduira à cette accusation en plus de celle de collaboration. Mais le dossier Hergé sera finalement classé par la justice.

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En 1948, il peut alors se relancer dans ses travaux et il termine Les 7 Boules de Cristal. Là encore nous avons droit à un album de haute volée.

Tout comme Le Secret de la Licorne, premier album du précédent diptyque, ce premier épisode ne nous éloigne pas trop de Bruxelles. On reste dans ses faubourgs et le lieu le plus loin reste le port de Saint-Nazaire en France.

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Mais une fois encore, cela ne veut absolument pas dire que l’aventure sera monotone, bien au contraire ! Avec Les 7 Boules de Cristal, Hergé franchit un nouveau cap. Premièrement il introduit ici des éléments narratifs qu’on lui connaissait peu, comme le suspense qui est plus présent que dans aucun autre album, le mysticisme et même un brin de fantastique. Pour son histoire, Hergé s’est évidemment inspiré de la légende de la malédiction de Toutankhamon qu’il cite d’ailleurs dans les premières planches. Le résultat fonctionne à merveille, on trouve un ton nouveau tout en restant complètement dans l’esprit de Tintin.

Au niveau des personnages on notera également des évolutions.

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Certes Tintin et Milou restent les mêmes. En revanche, le capitaine Haddock devient une sorte d’aristocrate à monocle et châtelain de Moulinsart. Le capitaine devient de plus en plus burlesque mais ne change pas sur le comportement. Il est vraiment toujours aussi fendard.

Le professeur Tournesol, apparu dans l’album précédent, Le Trésor de Rackham Le Rouge, devient à partir de cet album un personnage récurent. Ici, alors qu’il est d’abord mineur, juste là pour faire rire par sa surdité, il va prendre peu à peu de l’importance et se retrouver au cœur de l’intrigue.

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On notera également le retour de plusieurs personnages comme Nestor, l’ancien valet des frères Loiseau qui a gardé sa place à Moulinsart pour servir le capitaine.      

Puis nous retrouverons également la Castafiore, que Tintin avait rencontré dans Le Sceptre d’Ottokar. Mais surtout, on sera surpris de retrouver le général Alcazar, rencontré par Tintin dans L’Oreille Cassée alors qu’il dirigeait le San Theodoros. Il est d’ailleurs étonnant que les retrouvailles entre les deux hommes soient chaleureuses, au vu du fait que le général Alcazar avait voulu faire fusiller Tintin pensant que c’était un traître et un espion.

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On retrouve également le plus anecdotique professeur Cantonneau, apparu dans L’Etoile Mystérieuse et qui va être une victime des 7 boules de cristal.

Mais nous verrons aussi apparaître de nouveaux personnages, comme le professeur Bergamotte, un ethnologue ami du professeur Tournesol. Le personnage est inspiré de l’égyptologue Jean Capart.

Parmi les nouveaux protagonistes, on aura également Monsieur Hornet, Chiquito et Marc Charlet entre autres.

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On retrouvera aussi Dupond et Dupont.          

Concernant les dessins, ils sont absolument superbes. Les 7 Boules de Cristal est d’ailleurs l’un des plus beaux succès sur le plan visuel de la collaboration Hergé/Jacobs. De nombreux lieux de la BD sont tirés d’endroits réels. Concernant la célèbre momie de Rascar Capac, Hergé se serait inspiré d’une momie ramené du Pérou vers 1840 et qui fut exposé en 1926 à Bruxelles dans une exposition dédiée à la civilisation précolombienne. C’est du moins ce qu’en dit la version officielle. En réalité, Hergé se serait inspiré d’une momie faisant partie de la collection de Xavier de Grunne au château de Wezembeek-Oppem. Problème, Xavier De Grunne était un sénateur rexiste et l’intelligentsia cherche sans arrêt à effacer les pistes qui relient Hergéà ce mouvement politique. Bref autant se planter des clous dans les yeux car la photo de la momie de la collection de De Grunne ne laisse aucun doute quant à l’inspiration d’Hergé.   

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Certains détails visuels et narratifs nous montrent également qu’Hergé a fait un gros travail de recherche, notamment sur la civilisation inca qui est au cœur de cet album.     

Au final, Les 7 Boules de Cristal est un nouveau chef d’œuvre d’Hergé. Avec le temps, il s’est tout simplement imposé comme l’un des albums les plus cultes de la série.

    

 

Note : 18,5/20

Le Temple du Soleil

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Catégorie : Bande dessinée

Genre : Aventure

Année : 1949

Nombre de pages : 62

Nation : Belgique

Auteur : Hergé

Synopsis : Tintin et le capitaine Haddock se rendent à Callao au Pérou pour libérer le professeur tournesol prisonnier d’une bande d’indiens organisée. Mais sur place les choses se gâtent, la police locale semble terrorisée à l’idée de se frotter à cette bande. Bien vite Tintin et le capitaine font la rencontre de Zorrino, un jeune indigène qui leur explique que le professeur a été amené dans les montagnes au Temple du Soleil où résident les derniers représentants de la civilisation inca.   

Analyse critique :

(Attention SPOILERS)

Après avoir abordéLes 7 Boules de Cristal, nous continuons avec la suite mythique de cet album, j’ai nomméLe Temple du Soleil. Cette aventure fut pré-publiée dans le Journal Tintin entre 1946 et 1948 pour être finalement édité en album en 1949.

Il s’agit donc de la suite directe des 7 Boules de Cristal et c’est probablement l’un des albums les plus beaux et les plus importants de l’œuvre d’Hergé. C’est aussi le ou l’un des plus cultes.

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Nous voici cette fois ci au Pérou, nos héros ont bien l’intention de récupérer le professeur Tournesol mais vont se heurter à des difficultés majeures. En effet ils vont découvrir que le professeur a été amené vers une cité inca perdu dans les montagnes : Le Temple du Soleil. Un long périple s’engage : nos héros auront à affronter des attaques, des attentats, des falaises, des créatures dangereuses, des montagnes de neige et des avalanches, une forêt vierge, une chute d’eau, des guerriers incas et même le soleil lui-même.

Une aventure en or et palpitante qui plus est. Tout y’est, on retrouve la même structure que le précédent Diptyque, après un premier album peu exotique et assez posé au final, on part ici pour la grande aventure dans les recoins les plus mystiques de la terre.

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Car oui le mysticisme règne en maître dans cet album. Un mysticisme tournant autour des rites incas et qui ne fait que renforcer l’immersion dans l’aventure.   

Plus on avance, plus l’aventure devient extrême. On notera aussi qu’Hergé s’est non seulement énormément renseigné sur la culture inca, mais également sur celle péruvienne. Mais surtout il s’est beaucoup informé concernant les paysages des Andes et ses dessins sont parmi les plus beaux qu’il n’ait jamais fait.   

Certains passages de la BD sont même devenus cultes dans la culture populaire. Par exemple la scène du train victime d’un attentat, celle du Condor qui enlève Milou mais surtout le final avec le bûcher et l’idée géniale de Tintin qui ne fait que confirmer l’imagination fertile et astucieuse d’Hergé.

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Le Temple du Soleil est donc l’une des aventures les plus riches, si ce n’est la plus riche de l’univers de Tintin. Tout y’est absolument parfait.

On notera là aussi l’apparition de nouveaux personnages comme Zorrino, petit indien quechua marchand d’orange, qui va devenir le guide de Tintin, du capitaine Haddock et Milou à travers les montagnes pour atteindre Le Temple du Soleil. C’est le premier personnage d’enfant important dans Tintin, depuis Tchang dans Le Lotus Bleu (tous deux semblent d’ailleurs être adolescents).

Puis on aura des personnages comme le fils du soleil entre autres.

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Quant à nos héros ils restent les mêmes.

Concernant le fond, Le Temple du Soleil se veut avant tout une histoire d’aventure grandiose. Mais c‘est également un livre sur l’amitié, un sentiment extrêmement cher à Hergé. En effet on voit ici deux hommes qui vont braver tous les dangers pour aller sauver l’un de leurs amis.

On peut également trouver une petite critique du colonialisme espagnol au Pérou, à travers la scène de l’agression de Zorrino qui est d’ailleurs ensuite relatée de façon significative par le prêtre du soleil. Le fils du Soleil évoque également le pillage des biens de leurs peuples par les espagnols.  

      

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Le Temple du Soleil reste à ce jour, l’aventure de Tintin la plus adaptée sur le plus de supports (Cinéma, télévision, jeu vidéo, comédie musicale…). On comprend pourquoi vu la qualité de cet album.

Souvent cité parmi les meilleurs, c’est peut être tout simplement le meilleur.

Un chef d’œuvre d’Hergé

 

 

   

Note : 19/20


Tintin au Pays de L'Or Noir

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Catégorie : Bande dessinée

Genre : Aventure

Année : 1950

Nombre de pages : 62

Nation : Belgique

Auteur : Hergé

Synopsis : Les tensions internationales sont à leur comble et une guerre menace d’éclater. La situation est d’autant plus critique qu’en occident l’essence est falsifiée et déclenche l’explosion des moteurs des véhicules. Tintin décide d’enquêter sur le sujet. Ce périple le mènera jusqu’au Khemed un pays du Moyen-Orient déchiré par une guerre civile entre L’Emir Ben-Kalish Ezab et le Cheik Bab El Ehr.     

Analyse critique :

(Attention SPOILERS !)

Aujourd’hui je me décide à vous parler de Tintin au Pays de L’Or Noir, album qui n’est pas forcément le plus cité de son auteur et qui pourtant se révèle être l’un des plus intéressants. En réalité le gros problème de Tintin au Pays de l’Or Noir c‘est qu’il est sorti au mauvais moment.

En effet cet album a été commencé par Hergéà la fin des années 30. Il fut même pré-publié en noir et blanc entre 1939 et 1940. A la base l’album se situait donc après Le Sceptre d’Ottokar. C’est pourquoi, on reproche beaucoup àTintin au Pays de l’Or Noir d’avoir rendu anecdotique des personnages clés comme le capitaine Haddock (qui n’apparaît qu’à la fin) et le professeur Tournesol (qui est seulement mentionné). Mais lorsque l’album fut pré-publié, ces deux personnages n’avaient pas encore été crées. Ils ont donc été insérés in extrémis au dernier moment. Mais nous reviendrons plus tard sur ces insertions.

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On se retrouve ici avec un Tintin au Moyen Orient enquêtant sur la mauvaise qualité de l’essence. Il va alors découvrir un complot organisé par une puissance étrangère qui vise à paralyser les armées d’un pays rival en cas de guerre.

Le plus intéressant avec Tintin au Pays de L’Or Noir, c’est de voir ce que l’album était à la base et ce qu’il est devenu. L’intrigue était la même, mais le contexte politique de l’album a largement étéédulcorée. La première version je le rappelle date du 25 septembre 1939. Ainsi à la base l’histoire se situait dans un pays réel : La Palestine. Ensuite, la résistance arabe de Bab El Ehr contre l’Emir était en fait un groupe d’activistes terroristes juifs qui enlevait Tintin en le confondant avec un certain Goldstein censé venir prêter main forte à leur organisation. Hergé aborde ici le terrorisme sioniste en Palestine. En réalité, en 1936 avait éclaté la « guerre judéo-arabe ». L’année suivante la Palestine avait fait savoir qu’elle ne voulait pas que son territoire soit divisé en deux. En 1938, les autorités britanniques se chargèrent alors d’organiser l’immigration juive en Palestine. Mais cette autorité anglaise n’était pas du goût des juifs sionistes qui menèrent des attaques terroristes contre les autorités britanniques. Ces actions terroristes étaient le fruit d’organisations juives clandestines telles que la Haganah ou encore l’Irgoun entre autres. C’est donc cela que présente Hergéà travers cette organisation terroriste juive sioniste.

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De même, la guerre qui menace l’univers de Tintin fait sans doute référence à la seconde guerre mondiale qui menaçait d’éclater. Certains pensent que le fait que Müller soit un nom allemand laisse supposer que la puissance étrangère derrière le complot de l’essence falsifiée est l’Allemagne.

Mais lorsque la guerre éclate, Hergé doit laisser son album de côté.

Dés 1948, il le reprend et remanie beaucoup son histoire, notamment pour la réadapter par rapport aux évolutions de l’univers de Tintin entre temps (6 albums ont été réalisés depuis le début de ce projet). Cela dit à cette époque déjà, Tintin au Pays de L’Or Noir n’a plus la même saveur. La guerre qui menaçait est désormais passée et l’Etat d’Israël a éclot.

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En 1971, il remanie encore plus l’album. En effet les éditions anglaises n’aiment pas beaucoup les références faites à la situation de la Palestine sous autorité anglaise de la fin des années 30 et l’histoire des activistes terroristes juifs sionistes. Hergé remanie donc tout. Les terroristes juifs deviennent des rebelles arabes opposants au régime. Mais surtout, l’histoire ne se déroule plus en Palestine mais dans un pays fictif : Le Khemed. Ce n’est pas la première fois, que l’auteur a recours à ce procédé puisqu’il avait déjà créée des états fictifs comme Le San Theodoros, le Nuevo Rico, La Syldavie ou encore la Bordurie. Ici le Khemed semble être avant tout inspiré de l’Arabie Saoudite. On entend d’ailleurs l’Emir parler d’ « Arabie Khemedite ».

Si le contexte politique a donc remarquablement étéédulcoré et a beaucoup perdu de son sens, on trouve encore dans Tintin au Pays de L’Or Noir, des références plus qu’intéressantes. Par exemple Hergé met ici sur planches des terroristes financés par des grandes compagnies pétrolières. En l’occurrence Müller et sa bande financés par La Skoil Petroleum. Bref, là encore Hergé est en fin de compte assez visionnaire.

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Concernant les personnages, nous retrouvons Tintin et Milou dans les rôles centraux. On constate aussi que les Dupondt ont de l’importance. Ils sont ici véritablement hilarant j’en renvoie aux fameuses planches de la jeep dans le désert.

Cela dit dans cet album, le grand absent, c’est le capitaine Haddock qui n’apparaît qu’à la fin de l’aventure. C’est d’ailleurs l’un des principaux reproches fait à cette aventure par les fans. Une fois encore, la quasi-absence du capitaine Haddock s’explique par le fait que lors de la pré-publication de Tintin au Pays de L’Or Noir en 1939, le personnage du capitaine Haddock n’existait pas. Comment l’inclure à l’histoire donc ? Cela paraissait impossible vu le trajet que suit Tintin. Hergé choisit donc de faire mobiliser le capitaine Haddock au début de l’aventure (du fait des tensions internationales de l’intrigue) pour justifier son absence. Il le fait cependant revenir à la fin, sans qu’on en sache vraiment la raison. A ce niveau là l’auteur a trouvé un procédé que les mauvaises langues diront facile mais qui est en fait ingénieux. Le Capitaine cherche à expliquer la raison de sa présence au Khemed à Tintin mais en est chaque fois empêché par les évènements. Il est sans arrêt coupé dans son argumentation et finit donc par renoncer. Hergé tire donc au final profit de la situation avec beaucoup d’humour.

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Il en va de même pour le professeur Tournesol seulement évoqué sur la fin de l’album. Là encore cela sera l’occasion d’un trait d’humour.

Mais dans Tintin au Pays de l’Or Noir apparaissent également de nouveaux personnages :

On pense évidemment à l’Emir Ben-Kalish Ezab monarque du Khemed qui est plutôt du genre expéditif et direct concernant la justice. Le personnage est cependant assez drôle et au final assez attachant.

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Mais on retiendra surtout son fils le jeune prince Abdallah. Pour le dessiner, Hergé se serait inspiré d’une photo de Fayçal II étant enfant. Abdallah est donc après Tchang et Zorrino, un nouveau personnage enfant de Tintin. Au contraire des deux précédents cependant, Abdallah est une peste. Un enfant pourri gâté et infernal qui est, ceci dit, un véritable génie pour faire des blagues, son activité favorite. Serpentins, Cigares et cigarettes pétard, poudre àéternuer, pistolet à encre et poil à gratter sont les matériaux favoris d’Abdallah pour faire des farces de mauvais goût. 

Apparaîtra également le Cheik Bab-El-Ehr, l’ennemi juré de l’Emir qui cherche à le renverser. On n’est ici pas loin de la rivalité qui oppose Les généraux Alcazar et Tapioca au San Theodoros.

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Mais cet album est aussi l’occasion de retrouver certains personnages. Comme par exemple le señor Oliviera da Figueira. Petit marchand ayant un sens redoutable et affûté du commerce.

Mais surtout on retrouvera le Docteur Müller (qui prend ici le pseudonyme de professeur Smith). Ce dernier était déjà l’ennemi implacable de Tintin dans L’Île Noire. Ici il n’en est pas moins redoutable et s’impose même comme le méchant central de l’œuvre de Tintin à ce moment-là.

Pour ce qui est du dessin Hergé fait comme d’habitude du très beau travail. Premièrement on est bluffé par certains détails qui confèrent beaucoup de réalisme à l’œil. Que ce soit les pipe-lines dans le désert, le marché dans la ville de Wadesdah (capitale du Khemed) tout est très bien fait.

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On notera aussi que dans cet album Hergé joue beaucoup avec le visuel et ses effets. Il en fait même parti intégrante de l’intrigue. C’est notamment le cas avec Dupond et Dupont dans le désert qui finissent par confondre mirages et réalité. Ou encore la scène où l’un des deux détectives saute de la jeep en marche, pensant qu’elle était à l’arrêt au vu de la vitesse à laquelle la voiture de Tintin les a doublés. Cela donne lieu à plusieurs passages drôles.

Tintin au Pays de L’Or Noir est donc un album très riche est très intéressant malheureusement appauvri par la censure et une sortie tardive.

Un très bon Tintin malgré tout.                                      

 

 

Note : 16,5/20

Objectif Lune

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Catégorie : Bande dessinée

Genre : Aventure

Année : 1953

Nombre de pages : 62

Nation : Belgique

Auteur : Hergé

Synopsis : Tintin, le Capitaine Haddock et Milou partent rejoindre le professeur Tournesol en Syldavie ou ce dernier mène des recherches importantes. Mais sur place il découvre la réalité. Tournesol travaille dans une usine ultra secrète située dans une zone interdite perdue dans les montagnes. Dans ce lieu, il travaille avec d’autres éminents scientifiques pour le gouvernement syldave afin de créer une fusée spatiale capable d’amener des hommes pour un voyage vers la Lune…  

Analyse critique :

(Attention SPOILERS !)

Nous arrivons à l’une des aventures les plus incroyables du jeune reporter à la houppette, Objectif Lune. En 1953, en effet, Hergé décide de faire voyager son héros sur la lune. Une idée très en vogue à l’époque, mine de rien.

Hergé s’attaque donc làà ce qui est sans doute son album le plus ambitieux. Il reste d’ailleurs fidèle à un principe sur lequel il joue beaucoup depuis ces derniers temps : le diptyque. Objectif Lune est donc le premier épisode.

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Bien que cet album soit unanimement considéré comme l’un des plus ambitieux de l’auteur, certains lecteurs le trouvent également ennuyeux. Ce fut mon cas lors de mes plus jeunes années et c’était généralement l’album que je zappais quand je relisais tous les Tintin. Il est vrai que l’intrigue se situe quasi uniquement dans l’usine et il n’y a donc qu’assez peu d’actions. D’ailleurs Hergé en est parfaitement conscient car il ne cesse de greffer à son histoire des tas d’intrigues très sympas mais inutiles quant au cheminement du scénario, comme l’incident avec la pipe du capitaine Haddock, la crise de nerfs de Tournesol ou encore l’amnésie de ce dernier. Cela dit, ces passages, sur lesquels nous reviendrons, sont franchement hilarants. Mais pour en revenir au côté dit « ennuyeux » on peut aussi citer la visite de l’usine qui peut paraître longue et pénible même si Hergé essaie de rendre le tout plus palpitant par des éléments humoristiques qui souvent concernent le capitaine Haddock.

C’est donc les défauts qu’on peut trouver à l’album, mais honnêtement après la relecture, je le trouve vraiment bon. Tout d’abord, il y’a plein d’humour. Les frasques du capitaine Haddock sont innombrables. On retiendra également la crise de nerfs hallucinante et hilarante du professeur Tournesol alors qu’il vient d’être traiter de « zouave » par le capitaine Haddock. On n’oubliera également pas l’amnésie du professeur et les efforts déployés par le capitaine pour lui faire retrouver la mémoire.

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Mais outre les passages drôles il y’a des passages franchement intenses pour une BD et pour l’univers de Tintin. Je pense notamment au moment du départ de la fusée à la fin de l’album. Il faut dire que depuis les quinze albums faits avant, on a eu le temps de s’attacher aux personnages et on partage leurs émotions et leurs angoisses quant à ce voyage.

On a également des passages de suspense lors de l’intrusion d’espions sur la zone interdite.

Ensuite, sur l’aspect technique, il faut reconnaître qu’une fois de plus Hergé a livré un travail formidable et impressionnant. Comme d’habitude, il s’est énormément renseigné sur son sujet pour donner toute la crédibilité nécessaire à l’histoire. Rappelons quand même que nous nous situons 16 ans avant l’année 1969. Hergé nous parle déjà de moteur atomique et de moteur auxiliaire et de manœuvre de retournement. Où est-il allé chercher tout ça ?

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Hergé s’est notamment appuyé sur les conseils de son ami le scientifique Bernard Heuvelmans. Il paraît également clair que l’auteur a consulté les travaux et programmes de recherches de Werner Von Braun et Hermann Oberth qui, déjà avant la guerre, projetaient d’envoyer une fusée sur la lune. L’auteur aurait également consulté le livre L’Astronautique de l’astronaute français et pionnier du voyage spatial Alexandre Ananoff. Il se serait aussi inspiré du film Destination…Lune d’Irving Pichel sorti en 1950 et dont le titre se rapproche beaucoup de celui de l’album d’Hergé.

Un gros travail qui se ressent à la lecture de cette BD. On est impressionné par la crédibilité que confère Hergéà son œuvre par des tas de détails techniques et scientifiques.

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Parlons maintenant des personnages. Nos héros ne changent pas et restent plus ou moins les mêmes. Certes on découvre de nouvelles facettes à Tournesol, de nouvelles parts de son génie et surtout sa capacitéà piquer de sacrées colères.

On retrouvera avec rire Dupond et Dupont. Quand aux nouveaux personnages, on découvrira, Monsieur Baxter le directeur de la station et l’ingénieur Frank Wolfe, assistant du professeur Tournesol.

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On fera également connaissance avec le chef d’un complot qui vise à s’emparer des recherches effectués par nos héros. On verra qu’il est secondé par le colonel Jorgen, qui fait ici une très brève apparition mais que l’on pourra reconnaître pour l’avoir vu en traître félon dans Le Sceptre D’Ottokar, sous le nom de Colonel Boris.

Concernant l’esthétique de l’album, elle est très différente des autres albums. Peu attrayante parfois car tout se passe dans un centre de recherche. A ce propos, pour les vues d’extérieur, Hergé se serait inspiré de l’usine d’uranium d’Oak Ridge. Mais sur le plan esthétique, on retiendra des éléments visuels comme les uniformes, les scaphandres orange et surtout le design de la X-FLR6, la fusée conçue par le professeur qui est désormais devenue l’une des égéries de l’univers de Tintin.

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Les dessins sont superbes et Hergé montre de plus en plus de savoir-faire.

Concernant le fond, Objectif Lune s’inscrit bien dans son époque et en reproduit l’un des fantasmes : le voyage vers la lune. Mais loin de se complaire dans l’euphorie, Hergé montre déjà des inquiétudes à travers l’histoire d’un complot étranger. L’auteur démontre que le voyage sur la lune a au final un enjeu politique très important, d’où les convoitises étrangères. En ce sens l’album est très intéressant.

Objectif Lune est donc une très grande réussite dans l’œuvre d’Hergé et la première pierre d’un diptyque absolument mythique   

          

  

 

Note : 18/20

On a Marché sur la Lune

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Catégorie : Bande dessinée

Genre :Aventure

Année :1954

Nombre de pages :62

Nation : Belgique

Auteur :Hergé

Synopsis :Tintin et ses amis sont désormais dans la fusée X-FLR6 en direction vers la Lune, ou jamais l’homme n’a posé le pied. Mais dés le début du voyage rien ne va plus. Entre les Dupondt qui se sont embarqués par erreur sur le voyage, les astéroïdes, les problèmes de gravitéà bord. Le voyage vers la Lune n’est pas sans embûche, ni sans dangers.  

Analyse critique :

(Attention SPOILERS !)

Après avoir abordéObjectif Lune, premier opus d’un diptyque dédié au voyage de Tintin sur la Lune, nous abordons le second album : On a Marché sur la Lune.

On suit donc là la logique des deux précédents diptyques d’Hergé, après un premier épisode plutôt posé qui restait fixé en un même lieu, le second album marque le début de la grande aventure.

La fusée s’en va donc vers la Lune et y parviendra. Nos amis auront l’occasion de l’explorer.

Une fois encore, nous sommes biens là dans ce qui est sans doute l’œuvre la plus ambitieuse d’Hergé.

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Rappelons que nous nous situons entre 1950 et 1954, soit plus de dix ans avant le prétendu voyage sur la lune d’Armstrong. Et Hergé nous dresse ici un superbe portait d’un voyage lunaire imaginaire.

Une fois encore, on sera donc épaté par la crédibilité que l’auteur confère à son album. Certes, en y regardant de près avec des données scientifiques, on trouvera beaucoup à redire, mais pour le lecteur lambda : On a Marché sur la Lune remplit parfaitement le quota. Le décor lunaire est saisissant !

Hergé parvient également à instaurer une vraie ambiance. A tel point que lorsque Tintin retourne sur la terre à la fin, ça fait presque bizarre de revoir « le plancher des vaches » comme le dit le capitaine, du fait qu’Hergé nous a conditionnés au vide intersidéral tout l’album. On respire nous aussi de voir la terre revenir à nos yeux. Surtout que les dernières planches de l’album imposent une vraie tension au lecteur.

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Mais l’humour est également très présent et notamment à travers Dupond et Dupont. A ce propos il y’a une de leur phrase que j’adore : « Dire que nous marchons sur la Lune, là où la main de l’homme n’a jamais mis le pied ».

Les dessins sont superbes comme toujours.

Concernant les personnages, rien de nouveau. Si ce n’est qu’on va découvrir le vrai visage de Wolfe. Mais on peut aussi noter la présence de Jorgen (qui faisait déjà une courte apparition dans Objectif Lune). Jorgen, qu’on a connu dans Le Sceptre D’Ottokar, sous le nom de Colonel Boris a décidé de se venger de Tintin. Mais c‘est avant tout un homme d’action chargé de récupérer la fusée lunaire et ses découvertes pour une puissance étrangère.

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Au niveau du fond, donc, outre le vieux fantasme humain du voyage sur la lune, ici illustré, on peut aussi voir, ce qui transparaissait déjà dans Objectif Lune, le fait que le voyage lunaire reste avant tout politique et déclenche l’animosité des pays étrangers prêts à tout pour s’approprier les trouvailles du professeur Tournesol et de ses amis. On peut voir là une allusion indirecte à la guerre à la conquête de l’espace entre les USA et l’URSS.

On a Marché sur la Lune a donc inévitablement marqué et reste l’un des albums les plus cultes de Tintin.

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Ce nouveau Diptyque,qui sera aussi le dernier de l’univers de Tintin reste l’un des plus vendus et des plus populaires.

Une très grande réussite    

           

 

Note : 18/20

L'Affaire Tournesol

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Catégorie : Bande dessinée

Genre :Aventure

Année :1956

Nombre de pages : 62

Nation : Belgique

Auteur :Hergé

Synopsis : Tintin et le Capitaine Haddock purgent tranquillement du repos méritéà Moulinsart. Cependant des évènements étranges se produisent, les vitres, les miroirs, les vases volent en éclat sans aucune raison. Bien vite, le capitaine et Tintin soupçonnent le professeur Tournesol d’être derrière ces anomalies. Ils décident alors de le rejoindre à Genève où il s’est rendu. Mais ils découvrent que Tournesol est l’auteur d’une invention convoitée par des agents secrets de puissances étrangères.     

Analyse critique :

(Attention SPOILERS !)

Nous arrivons à l’un des albums les plus cultes de la série Tintin : L’Affaire Tournesol rédigé en 1956. Cet album est probablement l’un des plus réussis d’Hergé.

Depuis Les Sept Boules de Cristal, les aventures de Tintin semblent pas mal tourner autour du personnage de Tournesol. Dans l’aventure précédente, il était même le créateur d’une fusée lunaire. On constatait que son invention attisait les convoitises. Ici nous retrouverons au final le même schéma avec une structure totalement différente.

Cette fois, Tournesol a construit un appareil à ultrasons qui permet de détruite à distance des objets comme des vitres ou des vases. Bien vite des puissances étrangères s’intéressent à cet appareil qui, amélioré, pourrait devenir une arme redoutable. Des agents sont donc envoyés pour kidnapper le professeur. Evidemment Tintin, Milou et le Capitaine Haddock vont tout faire pour sauver leur ami.

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Une fois encore L’Affaire Tournesol est un album grandiose. Un superbe rythme d’abord : on commence tranquillement puis plus ça avance plus l’aventure prend. On notera aussi des dessins superbes. Concernant les planches en Suisse, Hergé est allé jusqu’à redessiner des lieux réels. Ce qui pousse certains à dire que L’Affaire Tournesol est un album « hyperréaliste ».  

L’ambiance de L’Affaire Tournesol est également frappante. D’abord chaleureuse, elle devient rapidement sombre et froide (illustration par l’orage qui suit la balade notamment). Ce climat n’est pas anodin et souligne bien le contexte du livre et le message qu’il véhicule. Nous y reviendrons plus tard. 

Parlons d’abord des personnages. Les principaux que nous retrouvons chaque fois restent égaux à eux-mêmes.

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C’est le cas pour la Castafiore qui jusqu’à présent n’avait fait que des apparences et qui va ici prendre plus d’importance qu’auparavant.

Mais surtout nous allons avoir affaire à de nouveaux protagonistes. On retiendra bien sûr le Colonel Sponsz le grand méchant de l’histoire. Officier cruel et implacable prêt à tout pour mettre la main sur les plans de l’appareil à ultrasons de Tournesol afin de s’en servir comme arme de destruction massive.

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Mais on aura aussi le très jovial mais très exaspérant Séraphin Lampion, représentant d’assurance qui rend visite au capitaine et à Tintin. Hergé aurait déclaré au sujet de ce personnage : « Lampion existe à des milliers d’exemplaires : C’est le type même du bruxellois. (…) On reconnaît également le bruxellois belgicain au fait qu’il porte, en même temps, une ceinture et des bretelles… »

Nous découvrirons également le professeur Topolino, spécialiste des ultrasons et confident du professeur Tournesol.      

Hergé sait donc nous offrir une fois encore des personnages qui se révèlent d’autant plus intéressant en les resituant dans le contexte.

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Ce contexte là constitue l’argument majeur de L’Affaire Tournesol. Nous nous trouvons ici en Europe et nous allons enfin découvrir un pays dont on entend parler depuis très longtemps dans l’univers de Tintin : La Bordurie.

Ce pays déjàévoqué plusieurs fois, avait été cité en premier lieu dans Le Sceptre d’Ottokar où il semblait représenter de façon indirecte (et d’ailleurs ambigu) l’Allemagne Nazie. Mais ici, on va découvrir ce qu’est vraiment la Bordurie, à travers son atmosphère froide et sombre, sous le règne de son maréchal Plekszy-Gladz aux moustaches légendaires. Un pays où les membres inquiétants des services secrets en gabardines grises et la police militaire du général Sponsz, semblent être à tout les coins de rue.

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Le lecteur l’aura rapidement compris, derrière La Bordurie, se cache en réalité l’URSS.           

La marque de cigarette « Makedonia » que Boris, l’agent bordure, fume laisse peu de doutes. Nous sommes dans un pays à la « démocratie populaire ». Une dictature dirigé par le maréchal Plekszy-Gladz qui partage des airs de famille avec un certain « Oncle Jo » Staline. On notera notamment ses fameuses moustaches rappelant celles du despote soviétique, et qui donne même naissance à la mythique expression du livre « Par les moustaches de Plekszy-Gladz ! ».

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Vingt-six ans après Tintin au Pays des Soviets, Hergé dénonce à nouveau le régime communiste. Certes il y’a moins de panache que dans le premier album. Il se rend intouchable en utilisant un pays fictif : La Bordurie et sa critique est toute en finesse. De plus le contexte n’est plus le même. Au début des années 30, l’URSS se trouvait de nombreux défenseurs dans la gauche occidentale. Mais à partit du début des années 50, il fait bon de critiquer l’URSS qui est désormais l’ennemi des USA et qui est devenu antisioniste, mettant des bâtons dans les roues à l’immigration juive vers Israël. Pour la première fois, la doctrine mondiale se décide à critiquer un régime dont les plus grands crimes étaient pourtant derrière lui.

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Mais dans L’Affaire Tournesol, Hergé ne dénonce pas uniquement le régime communiste soviétique, il métaphorise la guerre froide entre les deux puissances internationalistes que sont les USA et l’URSS, ici représentées respectivement par le conflit secret entre La Syldavie et La Bordurie. On notera également le fait que l’ennemi qui est montréà la Bordurie est « une cité d’outre atlantique qu’il est inutile de nommer » et à travers laquelle on peut reconnaître New York.

L’Affaire Tournesol fait donc part de la course à l’armement entre les USA et L’URSS pour la domination mondiale. Hergé expose ici ses inquiétudes quant à cette situation qui pourrait engendrer la destruction partielle du monde.

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L’Affaire Tournesol est donc l’un de ses albums qui s’inscrit dans la lignée des œuvres inquiétantes concernant la possibilité d’un conflit direct et destructeur entre Les USA et L’URSS.

C’est donc une BD très intéressante et clairement un nouveau beau coup pour Hergé.   

Pour la petite anecdote, c’est également à partir de cet épisode qu’apparaît le célèbre gag de l’appel téléphonique à la Boucherie Sanzot.

Pour le reste Hergé signe un album superbement illustré et très inscrit dans le contexte géopolitique de son époque.

L’Affaire Tournesol s’impose donc tout simplement comme l’un des sommets de son auteur.     

              

 

Note : 18,5/20

Coke en Stock

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Catégorie : Bande dessinée

Genre : Aventure

Année : 1958

Nombre de pages : 62

Nation : Belgique

Auteur : Hergé

Synopsis : Suite à des troubles politico-militaires au Khemed, L’Emir Ben Kalish Ezab envoie son fils Abdallah à Moulinsart pour le mettre en sûreté. Mais bien vite, Tintin et le capitaine Haddock décident de se rendre au Moyen-Orient pour prêter main forte à l’Emir et en apprendre davantage sur un réseau de trafic d’avions de chasse de type « mosquitos ». Mais nos héros vont également se retrouver sur la piste d’un autre trafic pire encore et dont les dirigeants sont puissants et dangereux. 

Analyse critique :

(Attention SPOILERS !)

Nous continuons notre cycle Tintin avec l’épisode Coke en Stock, album rédigé par Hergé en 1958. Cet album est l’un des moins cités des Aventures de Tintin et même l’un des plus méconnus. Pourquoi ce silence autour de Coke en Stock ? L’album serait-il mauvais ? Loin de là, au contraire même, on a droit à une aventure très riche mais qui, comme d’autres albums auparavant, déclencha quelques polémiques.

A la base il devait s’appeler Les Requins de la Mer Rouge qui aurait sans doute été plus accrocheur et plus vendeur. L’album partait donc sans doute déjà sur un handicap concernant le choix du titre. 

En réalitéCoke en Stock, tout comme l’album précédent qui était L’Affaire Tournesol, commence paisiblement dans un cadre familier au lecteur. Puis le tout prend de plus en plus d’ampleur et l’aventure débute peu à peu.

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Au début, on croit Tintin, le Capitaine Haddock et Milou lancés sur la piste d’un réseau de trafiquants d’armes. Puis ils finissent par découvrir un véritable réseau de trafiquants d’esclaves. 

L’album est remarquablement bien écrit comme toujours. On a droit à beaucoup d’humour (notamment avec le capitaine Haddock, mais aussi Tournesol et ses patins à roulettes). L’action est également très bien rythmée. Les dessins sont très beaux et certains sont mêmes sublimes. C’est notamment le cas pour le repaire caché de l’Emir Ben Kalish Ezab qui est directement inspiré de la cité de Petra en Jordanie.

Au niveau des personnages, on retrouvera nos héros habituels, mais également beaucoup (énormément même) de personnages secondaires des albums précédents. C’est le cas notamment pour le Général Alcazar, Abdallah, l’Emir Ben Kalish Ezab, Le Señor Oliveira de Figueira, Séraphin Lampion ou encore la Castafiore.

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Mais on retrouvera aussi beaucoup de méchants comme Dawson, Müller (qui a pris le nom de Mull Pacha), Allan, et surtout le redoutable Rastapopoulos que nous n’avions plus vu depuis Les Cigares du Pharaon et Le Lotus Bleu. Il a pris ici le nom de Marquis Di Gorgonzola et serait apparemment inspiré du milliardaire grec Aristote Onassis, un personnage controversé par ailleurs.

Des protagonistes toujours aussi hauts et en couleurs par ailleurs.

Mais c’est aussi l’occasion de découvrir un nouveau personnage prénommé Szut. Un pilote de chasse estonien que le capitaine et Tintin ont recueilli et avec lequel ils vont vivre un bon morceau d’aventure.

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Venons en désormais aux fameuses polémiques qui entourent cet album. Comme plusieurs fois auparavant, on emmerda Hergé pour des questions de « xénophobie » et de « racisme ». Ainsi lorsque le capitaine Haddock a une querelle avec une femme arabe il lui lance « espèce de bayadère de Carnaval ! » alors qu’à la base il disait « Espèce de Fatma de Prisunic !». La façon dont parlaient les noirs africains condamnés à l’esclavage en mode « Petit Nègre », fut également changé. De même que la lettre de l’Emir Ben Kalish Ezab qui, à la base, montrait une maîtrise partielle du français a été remanié pour donner un langage de poésie orientale.

Une fois de plus, on taxa Hergé de raciste. Mais comment pouvait-il en être ainsi puisque son album dénonçait justement la traite négrière moderne, et même l’esclavage moderne plus généralement.

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Car oui, là aussi Coke en Stock s’inspire bien de faits réels. En effet en 1955 un rapport de l’ambassade de France en Arabie Saoudite rapporta qu’un trafic d’esclave était en place au Moyen Orient. Généralement les trafiquants se faisaient passer pour les émissaires de riches musulmans qui se proposaient d’offrir le voyage du pèlerinage à la Mecque. En réalité les noirs africains qui s’engageaient dans le voyage étaient par la suite vendus comme esclave.

Ainsi Coke en Stock, qui s’inscrit parfaitement dans l’univers de Tintin, s’attaque ici à un sujet douloureux et grave. L’album fait part d’un fait inquiétant : l’esclavage existe encore de nos jours. La question mériterait d’ailleurs d’être développée, mais nous restons dans le cadre de Tintin, ne l’oublions pas.

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Coke en Stock est donc un superbe album injustement peu cité. Personnellement je trouve que tout y‘est pour  offrir au lecteur un super moment.        

 

 

Note : 17,5/20

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